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506 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Il y régnait une grande fraîcheur et une obscurité pres- que complète. Un filet de jour filtrant parfois entre les lames obliques des persiennes éclairait à demi sur leurs socles de basalte les empereurs et les déesses blanches qui peuplaient ces parages silencieux. Convaincu que ce n'était point là que je découvrirais celle que je cherchais, je me portai sans retard au premier étage où je présumais que devaient se trouver les appartements de la jeune femme. Pas plus qu'au rez-de-chaussée d'ailleurs, je ny rencontrai âme qui vive. Le château tout entier semblait assoupi et abandonné ; mes pas animaient seuls le vide des couloirs et des salons majestueux. Au surplus, ne me sentant point l'audace de pousser toutes les portes fermées que j'apercevais, ce qui au demeurant m'eût tenu jusqu'au soir, il me fallut bientôt convenir qu'à moins d'un coup de fortune, ma démarche prenait tournure de demeurer infructueuse. Aussi, après avoir deux fois parcouru de bout en bout l'interminable suite de chambres de toute sorte qui s'étendait de l'aile droite jusqu'à celle de gauche, j'allais me résigner bonnement à prendre position au haut de l'escalier d'honneur qui du moins, commandant la double enfilade, m'offrait un poste d'observation conve- nable, quand, en traversant un cabinet qu'on appelait le pavillon des Grandes Indes à cause des curiosités de ces pays qui s'y trouvaient rassemblées, je distinguai un léger bruit derrière une porte, entièrement masquée par un grand paravent de soie brodée. J'avais fait halte sur-le- champ, mais sans doute on m'avait entendu, car le bruit s'interrompit net. Je ne me décourageai point cependant, et tenant pour certain d'avoir enfin trouvé l'oiseau sur les œufs, si j'ose ainsi dire, je résolus d'attendre patiem-

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