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UNE BELLE VUE 5OI

toqué comme M. de Chaberton, mon pauvre père, sans défense, se trouvait décidément bien mal en point devant l'opinion.

XVII

Trois semaines environ s'étaient écoulées depuis la visite de M. le curé. Mon père, tout à ses ennuis, avait totalement oublié de contribuer, comme il l'avait promis, à l'acquisition du chemin de croix. Maman lui ayant rafraîchi la mémoire, il se reprocha sa négligence et voulut la réparer sans retard. Sur la fin d'une belle journée, nous montâmes, lui et moi, au village.

La cure de Saint Clair se trouvait, à deux minutes de l'église, au fond d'un cul-de-sac champêtre. On n'avait qu'à pousser une porte à claire-voie, laquelle en s'ouvrant secouait la sonnette, et l'on pénétrait dans un jardinet tout en longueur, mi-fleurs, mi-légumes, quasi sauvage, resserré entre deux murs croulants. Une avenue de tournesols et de roses trémières, tout juste large comme un homme, conduisait à la maison. Cette bicoque, revêtue d'espaliers, coiffée de chaume, semblait faite à la mesure d'un prêtre de campagne et tout particulièrement à celle du paysan mal dégrossi qui l'occupait.

A peine avions-nous, au tintement de la sonnette, franchi le seuil, qu'un bruit de chaises remuées, de portes battantes, de pas précipités, se fît entendre, et M. le curé s'élança à notre rencontre, sans rabat ni ceinture, portant sur son visage ainsi que dans sa mise les apparences du plus grand désordre. Rouge comme un piment, la sueur au front, essoufflé, il nous accueillit par une avalanche de phrases décousues :

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