Page:NRF 1909 10.djvu/70

Cette page n’a pas encore été corrigée

302 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

de suite renoncé — et Dieu sait s'il lui en coûtait ! — à combattre son projet de plantation. Feignant l'indifiFérence elle le laissait parler tout son saoul des arbres qu'il se proposait de choisir. Mais les arbres ont chacun leurs inconvénients : le vernis du Japon passe pour fiévreux, le marronnier se développe lentement, le platane est tardif, l'acacia peu fourni ; tel demande la proximité de l'eau, tel un sol ou un climat particulier. Ah ! cette fois, par exemple, dès qu'il s'agissait d'un inconvénient, maman d'abonder et de surenchérir ! C'était à espérer que parmi toutes les essences connues, indigènes ou exotiques, il ne s'en trouverait aucune qui remplît les conditions idéales.

En attendant que son choix fût arrêté, mon père tint à se mettre en règle vis-à-vis de M. Davézieux. Il était incapable de le prendre en traître. Il savait que sa décision provoquerait chez ce dernier un mécontentement des plus naturels, mais il n'admettait pas que l'on pût s'opposer à ce qu'il exerçât ses droits, lui qui était comme personne respectueux des droits d'autrui. Si d'autres se fussent trouvés à sa place et lui eussent bouché la vue, il eût été marri au-delà de toute expression, mais se fût contenté de maugréer, en constatant une fois de plus que rien n'arrive ici-bas que de calamiteux.

Il nous annonça donc un soir, durant la veillée, que nous irions le lendemain rendre visite aux parents de Prosper. La foudre serait tombée an milieu de nous que maman et moi n'aurions pas été plus atterrés. Mais lui, à peu près calme, depuis qu'il comptait sur sa belle trou- vaille pour rendre Longval habitable, expliquait posément que pour rien au monde il ne voulait agir en mauvais

�� �