Page:NRF 1909 10.djvu/59

Cette page n’a pas encore été corrigée

UNE BELLE VUE 29 1

queuse des barbes de mousse. De là, les piétons accè- dent au château par une avenue oblique et de pente assez roide, tandis que d'autre part le chemin des voitures décrit un ample circuit. Et là-haut, sur les terrasses superposées que soutiennent de puissantes maçonneries drapées de lierre, s'alignent des allées de marronniers ou de tilleuls centenaires dont les hautes cimes rejointes forment d'impénétrables voûtes. Aux extrémités de ces nefs, massifs, plates-bandes, parterres, bassins, jets d'eau se disposent avec la symétrie du vieux goût français. Tout cela a vraiment bel air, encore que la lourde bâtisse à toit plat qui forme le centre de ces beautés tant naturelles qu'artificielles soit outrageusement dénuée de style.

L'orangerie, les serres, le verger, la " fabrique " et l'humide repli herbeux que l'on appelait " le vallon " ne requéraient pas moins mon admiration enfantine que l'opulence des ombrages, l'ordonnance du jardin et la profusion des fleurs. Mais j'admirais jusqu'au château ! Par la suite, j'ai déchanté en ce qui concernait les ri- chesses d'un intérieur où l'on avait à choisir entre le mauvais goût du Louis-Philippe et celui du second Empire. Le mobilier de Longval, acajou, capiton, palissandre et faux Boule, m'émerveillait par comparaison avec la modeste banalité du nôtre. Et je n'avais pas les yeux assez grands pour contempler dans le vestibule les figures du Travail, de la Probité et de l'Epargne, qu'un méchant élève d'Hippolyte Flandrin avait peintes en couleurs anémiques sur un fond de café au lait.

Toutefois, malgré tant d'attraits, Longval ne m'offrait pas des plaisirs d'une qualité parfaite, lorsque du vivant

�� �