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LES " CAHIERS " DE CHARLES PEGUY 263

même, bien que moins sûrement, ces nombreux et libres Courriers d'Arménie, de Russie, de Fin- lande ou de Pologne. Mais alors tous ces écrits, demi-perdus parmi la production courante, ne tombant pas tous sous les mêmes yeux, n'auraient pas pu s'éclairer, se compléter les uns les autres, suggérer par leur rapprochement une direction d'ensemble, et presque une doctrine, — dégager une âme commune. Si les Cahiers n'existaient pas, telle étude documentaire, sur la Délation aux " Droits de V Homme ", ne serait plus témoignage historique, mais polémique d'un parti contre un parti. Enfin, si les Cahiers n'existaient pas — les Cahiers de la Quinzaine^ — nous n'aurions pas les Cahiers^ — les Cahiers de Péguy lui-même, qui ne ressemblent pas aux autres, ni plus générale- ment à quoi que ce soit dans aucune langue ; ces Cahiers, vivants monologues où chaque fois qu'il en a le temps, trop rarement à notre gré, il épanche en un désordre apparent ses humeurs et son humour, ses désenchantements et ses ravisse- ments, son imagination et sa philosophie.

Celui qui me disait un jour : " Péguy fait son petit Rousseau " ne songeait pas, assurément, au Contrat ni à VHéloïse^ mais aux chimères de Rous- seau persécuté, aux lettres à Hume et à Diderot. Non, il n'y a pas de Rousseau dans Péguy. Et il n'y a guère de romantisme. S'il lui arrive, comme

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