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la nouvelle revue française

le : “Mon enfant va jouer plus loin !” avec lequel elles me repoussaient chaque fois que je m'approchais de leurs conciliabules, tout me montrait qu'elles n'ignoraient pas complètement le secret de la maison Bucolin.

Nous n'étions pas plus tôt rentrés à Paris qu'une dépêche rappelait ma mère au Hâvre : Ma tante venait de s'enfuir.

— Avec quelqu'un ? demandai-je à Miss Ashburton auprès de qui ma mère me laissait.

— Mon enfant, tu demanderas cela à ta mère ; moi je ne peux rien te répondre, disait cette chère vieille amie que cet événement consternait.

Deux jours après nous partions, elle et moi, rejoindre ma mère. C'était un samedi. Je devais retrouver mes cousines le lendemain, au temple, et cela seul occupait ma pensée ; car mon esprit d'enfant attachait une grande importance à cette sanctification de notre revoir. Après tout, je me souciais peu de ma tante, et mis un point d'honneur à ne pas questionner ma mère.


Dans la petite chapelle, il n'y avait ce matin-là pas grand monde. Le pasteur Vautier, sans doute intentionnellement, avait pris pour texte de sa méditation ces paroles du Christ : “Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite”.

Alissa se tenait à quelques places devant moi. Je voyais de profil son visage ; je la regardais fixement, avec un tel oubli de moi qu'il me semblait que j'entendais à travers elle ces mots que j'écoutais éperdument. — Mon oncle était à côté de ma mère et pleurait.

Le pasteur avait d'abord lu tout le verset : “Efforcez-