Page:NRF 19.djvu/84

Cette page n’a pas encore été corrigée

82 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Quoique ces maximes soient d'elles-mêmes assez estimables, j'avoue, à ma honte, qu'elles ont été chez moi ternies par une vivacité un peu trop outrée, dans les occasions où j'ai cru qu'on ne remplissait pas bien son devoir. Ce premier mouvement m'a souvent emporté à des pro- cédés trop vifs et à des termes peu convenables à la dignité d'un com- mandant.

Il lui coûte sans doute moins d'avouer :

La vue d'un danger pressant m'a souvent causé des révolutions étranges, quelquefois même des tremblements involontaires dans toutes les parties de mon corps.

S'il a l'art des chefs militaires qui est « de toujours mettre ses équipages dans le cas d'être braves par nécessité », il apporte une attention continuelle à ne pas les exposer inutilement ; ses hommes le savent et il peut se permettre des ménagements dangereux :

Quand il était question d'éviter ou de joindre avec plus de promp- titude les vaisseaux ennemis, quelque près qu'ils fussent de moi, je ne craignais pas de faire mettre mes gens à fond de cale, parce que j'étais sûr qu'à mon premier signal ils se remettraient aussitôt à leurs postes.

Et ne parle-t-il pas joliment de sa sensualité lorsqu'il écrit :

Il semble qu'un cœur épuisé par sa propre inconstance, et accou- tumé à courir après tous les objets, soit incapable de s'arrêter à un seul, et de réunir, à l'égard d'une personne, les désirs vastes qu'il formait pour toutes les autres.

Pour unécumeur de mers, c'est assez délicatement dit.

JEAN T SCHLUMBERGER

��*

��LA BATAILLE DU JUTLAND VUE DU « DERF- FLINGER », par le capitaine de corvette Georg von Hase (Payot).

Le récit du capitaine de corvette von Hase vient faire pen- dant à celui que le commandant Semenoff nous a donné de la bataille de Tsoushima, mais avec toutes les différences qui sépa- rent un Russe d'un Allemand. Déplus, Semenoff parle en officier d'état-major, soucieux de placer les événements à leurs plans res- pectifs dans une douloureuse épopée, tandis que von Hase veut

�� �