RÉFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE
��LE GERMANISME ET LA FRANCE
L'attitude énergiquement anti-germanique qu'a prise au mo- ment de la guerre et que garde encore en grande partie l'in- telligence française était un fait naturel et nécessaire, qui corres- pondait à des attitudes analogues chez tous les peuples en guerre. Nécessaire au point de vue logique, et nécessaire aussi au point de vue du but à atteindre, qui était la victoire. Tout ce qui tendait et soutenait les forces belliqueuses, tout ce qui met- tait le spirituel et le temporel de la France en état de défense contre l'étranger pouvait être considéré comme bon. L'esprit n'avait qu'à faire la gymnastique nécessaire pour conserver, en même temps que sa liberté, les conditions de cette liberté, à savoir une patrie.
Aussi la liberté spirituelle était-elle beaucoup plus facile à maintenir pour un combattant, qui vivait à même le matériel de ces conditions, que pour un civil, qui ne pouvait faire, comme Diogène, que rouler son tonneau, en essayant de lui commu- niquer, sur le pavé de la cité, un bruit de canon, et que mobi- liser un spirituel beaucoup plus difficile à démobiliser que le temporel du poilu. C'est à ces moments que l'on sent à quel point il est utile d'avoir appris de Montaigne, de Descartes et de Pascal la distinction des ordres, la pluralité des tableaux sur lesquels se joue une existence humaine, et que comporte bien plus encore une existence nationale.
Le manque de souplesse, les retards que paraît aujourd'hui com- porter notre démobilisation spirituelle s'expliquent en bonne par- tie par des considérations très sérieuses, et par une situation maté-
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