NOTES 243
digne de Polyeucte, de Y Imitation ou de ces Entretiens solitaires de Brébeuf qui sont une des perles de la poésie catholique. En empruntant à des maîtres le ton le plus convenable sans aucun souci apparent d'originalité, M. Ghéon fait preuve d'une humilité fructueuse, car il a ainsi réalisé une œuvre d'un très grand charme, pleine de poésie et d'effusion, où la monotonie est éludée avec beaucoup d'art, et qui est très supérieure, non seulement au Pauvre sous l'escalier, mais encore à tout ce qu'on a tenté dans le même esprit, depuis bien longtemps. Ce sont, a-t-on dit, des pièces pour patronages : sans doute, mais la tragédie classique est née dans un collège. Si elle y retourne, ne serait-ce point qu'elle n'a plus de place ailleurs. A ce compte Cromedexre-h-Vieil. un des rares ouvrages dramatiques où l'on ait senti passer un vrai souffle lyrique, ferait l'effet d'une pièce à l'usage d'un patronage nietzehéen.
ROGER ALLARD
LA MUSIQUE
« LE MARTYRE DE SAINT SÉBASTIEN » A L'OPÉRA.
L'Opéra vient de reprendre le Martyre de Saint Sébastien auquel ont collaboré un musicien de génie, Claude Debussy, un prestigieux créateur d'images verbales, Gabriel d'Annunzio, un peintre chez lequel une imagination exubérante, mais réglée, s'allie à un métier infaillible, Léon Bakst. Et c'est M me Ida Rubinstein qui incarne, comme lors de la création, en 191 1, le personnage du saint. Jamais, peut-être, on ne vit semblable collaboration. D'où provient donc la sensation de fatigue et d'ennui que dégage cette vaste et complexe composition ?
Je ne crois pas que la responsabilité en incombe aux exécu- tants. Que la réalisation n'ait pas été à la hauteur des intentions du musicien et du poète, que ces intentions aient même été complètement trahies — cela n'est pas douteux : il faut avouer que rarement nous eûmes à l'Opéra spectacle plus déplorable, et puisqu'il s'agit d'un artiste tel que Debussy, le mot « crime » pourrait être sans exagération aucune appliqué à la réalisation de la partie musicale de l'œuvre. Je n'insiste pas sur la mutila- tion subie par le texte et la musique du fait de la suppression
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