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2l8 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

chien, nommé Nana, qui vit dans une pièce au premier. Le chat Pitou, que j'ai nommé plus haut, adore les chiens. Il arrive quelquefois que, par mégarde, et sans s'en apercevoir, on le laisse entrer et l'enferme avec Nana. Quand on vient le chercher, on le trouve trempé comme s'il sortait d'un baquet, et enchanté. C'est Nana, qui, le tenant entre ses pattes, l'a débarbouillé de toutes les façons. J'ai eu un petit griffon bruxel- lois, nommé Moukey, que Rouveyre m'avait donné. Le chat Laurent dont j'ai également parlé plus haut, et Moukey étaient inséparables. Ils se promenaient ensemble dans le jardin. Ils mangeaient ensemble. Ils dormaient l'un contre l'autre. On appelait Moukey, qu'on voyait aussitôt Laurent se montrer aussi. J'ai perdu Moukey en 1918. Pendant quinze jours, je ne dis que le vrai, Laurent le cherchait partout, sur le lit, jusqu'à soulever la couverture, sous le lit, sous les fautueils, sous la table, dans l'armoire. On n'avait qu'à prononcer tout haut le nom du chien : il vous regardait et attendait, comme si son compagnon allait venir. Toutes ces choses ne sont-elles pas attachantes ? Peut-on ne pas en être touché ? Les bêtes, toutes les bêtes, quand on sait s'y intéresser et qu'on les voit se montrer ainsi, ne méritent-elles pas tous les égards ? Le signe particulier de Chati était ceci : il fallait constamment l'avoir dans les bras, soit qu'on l'y prît, soit qu'il y sautât de lui-même. Installé là, il vous prenait par le cou et vous couvrait le visage de caresses. Le reposait-on à terre et s'éloi- gnait-on qu'il vous suivait, avec des yeux qui demandaient clairement qu'on le prît de nouveau à la même place. Je le dis pour les gens qui ignorent ce que sont les bêtes, et les chats en particulier, délicieux animaux si méconnus : n'est-ce pas mer- veilleux et attachant et troublant aussi de trouver tant de sensi- bilité chez un animal ? Et loin de moi l'idée de dire que les miens sont uniques, ni même particuliers. Presque tous sont de même, ou susceptibles de l'être. Tout dépend des mains entre lesquelles ils tombent. Les animaux rudoyés, ou dans les mains de gens indifférents, ceux qui vivent à l'abandon dans des ter- rains vagues ou dans des jardins publics, eux aussi ont ou auraient leurs gentillesses. De même c'est une erreur de se figu- rer qu'un animal qu'on élève montre un attachement plus parti- culier. Je n'ai pas élevé un seul des chats et des chiens qui sont

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