Page:NRF 19.djvu/169

Cette page n’a pas encore été corrigée

SILBERMANN 1 67

envers chacun de nous à une sorte d'interrogatoire, prenant des notes d'après les réponses. On apprit que Silbermann avait sauté une classe. Le fait était rare et motiva des explications.

— J'étais en retard d'une année, déclara-t-il, et c'est pour réparer ce retard, comme j'ai eu de bonnes places en cinquième.

— Je doute que vous puissiez suivre le cours.

— J'ai eu trois prix l'année dernière, répliqua-t-il avec insistance.

— C'est très bien, mais vous ne vous trouvez pas préparé comme vos camarades aux matières de notre ensei- gnement. Le programme scolaire est gradué, et qui manque un échelon risque fort de tomber.

— ■ J'ai travaillé pendant les vacances, Monsieur.

Durant ce dialogue, Silbermann s'était tenu debout et il avait parlé d'une voix très humble. Malgré cette attitude exemplaire, son ton sonna étrangement dans la classe tant il avait voulu être persuasif.

Lorsque nous sortîmes en récréation, quelqu'un s'appro- cha et lui dit en haussant les épaules :

— Voyons, tu ne pourras pas rester ici. Il faudra que tu redescendes en quatrième.

— Ah ! tu crois ça ? répondit Silbermann, faisant une mine ironique. Puis, la main vivement tendue, avec un petit battement âpre de la narine :

— Combien veux-tu parier que je serai au moins deux fois premier avant la fin du trimestre ?

��L'après-midi de ce premier jour, nous eûmes congé. Philippe Robin vint me voir. Ma famille le trouvait char- mant. Mon père me citait en exemple ses manières viriles et ma mère ses attentions courtoises. Ils avaient beaucoup encouragé notre camaraderie. La première fois que je l'avais nommé devant elle, ma mère m'avait demandé s'il n'habi-

�� �