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ÉTUDE DE NU l6l

Qui eût osé te contester que je porte, par exemple, l'Equateur en ceinture, qu'en s'éveillant au creux de ma hanche on a fait le tour du monde ? A ta place, moi, j'au- rais dit : dans nos baisers — brrr ! d'y penser, fièvre et frissons ! — tournent des feux d'artifice (soleil d'été, fête nationale) qui lanceraient des boules de neige parmi les roses de salpêtre ! Enfin ma chair pourrait avoir des per- fidies de lagunes. Vicieux, mon haleine t'eût donné — ah ! des moiteurs de malaria ! Un sculpteur laisse bien dans la glaise son pouce et parfois son génie : que diable si mes talons sur les plages ne creusent des fossettes de sable où frissonne ma beauté ! Avant de me décoiffer, tu pourrais imaginer que mes tresses, sous l'arceau d'écaillé, ont le caprice des jardins anglais. Tu ne discuteras pas que nos cheveux, au réveil, sont des broussailles enflammées d'aube ! Quand nous roulions dans les gazons, le regard levé vers un ciel pris dans les glaces des nues, nos baisers pouvaient se donner le luxe de tremper dans l'onde antarctique !

Les jours d'introuvables images, tu aurais bien pu chan- ter qu'un amour universel s'engouffre au fond de mes bras, avec reprise au refrain :

Je suis l'amant de la Terre Puisque ton amant, ma chère !

Laisse-moi me moquer un instant ! Les jeunes gens sont désormais avertis et positifs. Il n'est plus de naïvetés qu'en palme, au front des poètes ! Puisque tu n'es pas homme de lettres, ne joue donc pas ce rôle-là. Le squelette de vos pantins ne s'articule qu'avec des mots. Vous dislo- quez l'existence. Par l'amas des métaphores se distingue un écrivain, comme un grand port se désigne au nombre de ses sémaphores. Soyons maniaques d'assonances ! Méta- phores, sémaphores ! Tel est le genre de vos trouvailles, quand vous désirez du tapage : les assonances sont vos cymbales.

Au fond, je ne me moque pas. Démence ? Fumisterie ?

ii

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