Page:NRF 19.djvu/121

Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTES 1 1 9

nous a valu la Belh au bois- Dormant de Tscbaïkovsky, réduite d'ailleurs à un seul acte. On n'aime pasTschaïkovskv en France et je partage personnellement l'antipathie de mes collègues français a cet égard. Pourtant, la virulence de certaines attaques m'a frappé : les ballets de Tschaïkovsky sont en effet ce qu'il a Fait de mieux et il y a dans la Belle au Bois Donna ni des pages charmantes. Mais il est probable qu'il s'agit d'une sorte d'idio- crasie : il v a un cas Tschaïkovsky, comme il y a un cas Cha- brier, un cas Bruckner ; nous ne parvenons pas en effet à com- prendre. Français et Russes, ce qui rend chère aux Allemands la musique de Bruckner. Un étranger ne peut s'expliquer l'en- gouement des musiciens français pour Chabrier. Il en est de •ne de Tschaïkovsky dont le charme, le caractère profondé- ment national (bien plus national que Rimskv-Korsakoff) ne seront jamais saisis par un esprit de culture française.

Il faudrait maintenant parler danse, mise en scène, spectacle, mais cela ne m'est pas facile, car bien des vérités sont non seule- ment d( blés à entendre, mais aussi à dire. Nous savons tous ce que nous devons à Serge de Diaghilew : le roic de cet organisa- teur, de cet animateur incomparable a été vraiment unique dans la vie artistique européenne de ces quinze dernières années; mais notre reconnaissance, notre admiration pour ce qu'il a fait ne peut nous [river du droit d'exprimer aujourd'hui nos critiques et nos craintes. Sa troupe s'est appauvrie : Miassine n'a pu être rem- placé, ni comme maître de ballet, ni comme danseur ; le départ de Sokolova se fait également sentir, surtout dans le Sacre du Printemps : la Nijinska a beaucoup de goût, une excellente technique, mais elle est trop nerveuse et manque, de résis- tance. Tréiiiova est une danseuse classique de premier ordre, t>a technique est presque impeccable ; Idzikov. mu est un gym- naste étonnant, mais dans le Spectre de la Rose ils ne peuvent nous faire oublier Nijinsky et Karsavina.

Cela peut encore changer : la saison prochaine Diaghilew nous amènera peut-être Spessivtseva ; peut-être reverrons- nous Karsavina, Miassine. Ce qui est bien plus grave c'est l'absence d'homogénité, l'absence de discipline dans le corps du ballet, et surtout l'affaiblissement de cet esprit autoritaire, il est vrai, mais enthousiaste qui dirigeait toute l'entreprise et lui imprimait une vie puissante. Je souffre en voyant se décom-

�� �