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de haute philosophie sur l'amour. Nous mettrons donc le livre de M. Gsell non à côté du Journal des Concourt, mais tout près des Mémorables de Xénophon et des Vies de Diogène Laërce. L'un et l'autre sont sévèrement jugés à cause de l'insigni- fiance (?) des propos qu'ils nous rapportent l'un de Socrate et l'autre de Diogène le Cynique. Excellente raison pour croire que ces propos sont vrais. Les entretiens de M, Bergeret, s'ils eussent été recueillis par M. Goubin, eussent comporté fort peu de substantifique moelle. Il fallait Platon à Socrate et M. France à

M. Bergeret. albert thibaudet

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LE PASSAGE DE L'AISNE, par Emile Ckrmont. (Les Cahiers Verts, Grasset).

Je me demande si M. Daniel Halévy en publiant ce cinquième Cahier Vert s'est rendu compte de l'arme qu'il pourrait devenir entre les mains d'antimilitaristes intelligents. Jamais encore acte d'accusation plus écrasant n'avait été dressé contre l'impéritie et la sottise du commandement français de 19 14 que ce récit, rédigé sur l'ordre de son colonel par le sergent (ou le sous-lieu- tenant) Emile Clermont, du passage de l'Aisne et des combats soutenus sur le plateau de Nouvron par le 238^ d'infanterie, entre le 13 et le 21 septembre 19 14.

Les « directives » données à Clermont par son chef de corps sont évidentes dès les premières pages : mettre en valeur la con- duite du régiment et de son commandant au cours de ces dures journées, et aussi rejeter sur le Général de Division toute la res- ponsabilité des lourdes pertes subies parle 238^.

Faire traverser l'Aisne en plein jour à tout un régiment, sous les vues et le canon de l'ennemi, sans nécessité pressante, au lieu d'attendre la nuit ; emprunter à un colonel une compagnie sans lui dire ce qu'on en veut faire ; enlever les trois-quarts de sa troupe à un capitaine qui part à la contre-attaque sans même l'en prévenir, voilà de quoi convaincre en effet ce général d'in- capacité notoire et d'affolement caractérisé.

Mais que dire de la façon de manœuvrer du chef de corps, des chefs de bataillon et de compagnie dont Clermont a mission de chanter les louanges ? Que dire de ce chef de corps qui, à proximité de l'ennemi, au lieu de largement articuler ses troupes,

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