LES REVUES 763
l'esprit, hommes de raison plutôt que rationalistes, hommes à idées plutôt qu'idéologues... Le monde se trouvait être précisément à la mesure de leur esprit. Nos frontières ne les gênaient point. Ils savaient qu'ils étaient chez eux encore, en Prusse ou en Russie. On les eût bien étonnés, je pense, en posant dans les termes d'un débat d'Etat à Etat la question des relations intellectuelles entre deux pavs. Les choses d'Etat sont d'un ordre, et les choses de l'esprit d'un autre. Les victoires ou les défaites des nations leur semblaient sans rapports avec la valeur et la propagation des idées, et leur action européenne ne se fondait qn'en leur humanité.
Et M. Jean Guehenno, ayant observé que « des rapports intellectuels supposent une réciprocité », termine en posant une question :
Sommes-nous prêts encore à l'échange ? L'échange, c'est nresque l'amitié ; c'en est du moins la condition. Il suppose, je le crains, une autre atmosphère que celle dans laquelle nous vivons. Montesquieu, un jour qu'il se rappelait ses voyages, écrivait : « Q.uand j'ai voj'agé dans les pays étrangers, je m'y suis attaché comme au mien propre, j'ai pris part à leur fortune, et j'aurais souhaité qu'ils fussent dans un état florissant. » Quand donc de jeunes Français et de jeunes Allemands porteront-ils les uns chez les autres un peu de cette bienveillance et de cette sympathie ? Je ne sais si l'on pourra parler de relations intel- lectuelles vraiment profondes entre les deux pays avant le jour où cela se fera.
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��CORRESPONDANCE
Nous avons reçu de M. Victor Barrucand la lettre suivante :
Alger, le 11 avril 1922. Monsieur le Directeur,
On me communique la Nouvelle Revue Française du i^r avril avec une chronique dramatique de M. Boissard que je crois devoir rectifier en ce qui me concerne, par respect pour la vérité, la vraisemblance et la mémoire de Remy de Gourmont.
Il ne me souvient pas d'avoir jamais rencontré Remy de Gourmont. Son nom réputé n'a pour moi aucun visage connu. Je ne me suis jamais présenté à lui et si je l'avais rencontré je n'aurais pas pu le reconnaître.
J'ignore également M. Boissard en dehors de ses chroniques et je ne crois pas être jamais entré dans son bureau où je n'avais rien à faire.
Avant de me fixer en Algérie (depuis plus de vingt ans) j'écrivais parfois à la Revue blanche, mais je n'allais pas au Mercure de France et me contentais de suivre avec sympathie cette intéressante revue litté- raire.
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