684 ^^ NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
Il se met en devoir de ramener l'instrument à sa place, mais avec peine, n'ayant plus qu'un bras libre. M"'^ Gassin pousse un cri en reconnaissant, au bord d'une de ses poches, la couleur du papier à lettres.
— Qu'est-ce que vous avez dans vos poches ?
— Mais comme d'habitude, des papiers. Aidez-moi à repousser le piano.
Elle ne bouge pas :
— Où avez-vous trouvé ces lettres?... Il 5' avait une cachette là derrière ?... Vous saviez où elles étaient?... C'est donc pour cela que vous êtes venu sans prévenir ?
— Il était temps... M"'*" Heuland m'écrivait, il y a deux jours, que les déménageurs avaient commencé... J'ai craint d'arriver trop tard.
Il est parvenu, d'une seule main, à faire rouler le meuble. Encore un coin de tapis à redresser et tout est en place. M"*" Gassin commence à prendre peur de son air buté.
— N'était-il pas plus simple, dit-elle, de m'indiquer l'endroit... à moi qui suis toujours dans la maison... Pour- quoi ne l'avez-vous pas fait pendant tout cet hiver ?
Elle n'ose pas encore comprendre :
— Donnez-les-moi !
Mais il boutonne plus étroitement son manteau :
— Je vais sortir le premier. Vous me rejoindrez au coin du boulevard. Nous irons ensemble chez mon frère et j'y brûlerai tout cela devant vous.
Elle s'élance vers lui :
— Jamais, jamais ! Vous n'avez pas le droit ! Ces lettres m'appartiennent ! Elles sont tout ce qui me reste de mon bonheur...
Elle essaie de saisir un des paquets, mais il le retient avec trop de force pour qu'elle ait espoir de s'en emparer. Alors elle s'accroche à ses vêtements :
— Donnez-les-moi ! Je vous jure que je n'en ferai pas mauvais usage. Croyez-vous que si je voulais démontrer
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