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630 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

dant aussi quelque attention : c'est celui de l'effondrement des principales valeurs idéales dont un pays aussi grand et aussi puissant que l'Allemagne avait fait les bases de son système moral et éducateur, et des efforts de relèvement qui se font jour dans ce domaine-là aussi, gauches d'ailleurs, faibles et incohérents autant qu'ils sont, dans le domaine économique, adroits et organisés, — indéniables néanmoins.

Les discours de la Gœthe-Woche sont à ce point de vue assez révélateurs pour valoir qu'on les signale.

Hauptraann se montre avant tout soucieux de l'unité alle- mande : « L'idée d'unité, disait-il dans son introduction au drame d' « Egmont », c'est dans l'âme du peuple qu'elle doit d'abord exister. Il y a, de ce qui est national, d'autres symboles encore que l'épée. » Puis, plus loin : » Rien ne pourra faire perdre aux Allemands l'amour qu'ils ont pour leurs poètes » (dièse ndrrische Liehe fur ihren Dichtern). L'ancien régime l'a bien prouvé, qui a fait l'impossible pour cela.

Mais ne serait-ce pas plutôt aux lorces rrançaises de la rive gauche qu'il pense quand il constate que « les Alba ont tou- jours tort », faisant allusion au duc d'Albe, ce représentant de la manière forte dans ks Pays-Bas qui est un des principaux personnages d^Eginont F On peut se demander si cette vérité le frappait autant lorsque les armées allemandes pressuraient la Belgique. D'autre part il faut avouer que la plate-forme est singulièrement étroite que les événements, les fautes de leur pays et, dans une certaine mesure, l'attitude des alliés a laissée, pour s'y tenir sans bassesse, aux Allemands soucieux de clair- voyance politique et de loyauté vis-à-vis de l'ennemi vainqueur, autant que préoccupés de l'intérêt et de la dignité de leur pays, — et que pour peu qu'ils fassent litière de ces derniers, ceux qui d'abord en France les mépriseront et les accuseront de platitude seront le plus souvent les mêmes qui leur auraient fait, d'une partialité inverse, le pire des griefs.

C'est là un dilemne dont on ne voit guère comment se tire- ront les meilleurs parmi les Allemands. Ce n'est d'ailleurs que pour eux qu'il existe.

Thomas Mann ne fit pas, aux actualités, d'allusion aussi directe : il avait pris pour thème Gœthe comme éducateur et l'influence capitale sur lui, de Jean-Jacques Rousseau. Il

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