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CHRONIQUE DRAMATIQUE S 93

et qui, accueilli par la bonne de la façon que j'ai dite, trouve la chose si drôle qu'il ne s'arrête plus de rire et communique sa gaieté à toute la salle. Cela n'a l'air de rien de rire ainsi. C'est pourtant fort difficile, et cet acteur y a été merveilleux, avec le plus grand naturel;

J'avoue que j'ai peu de goût pour les pièces macabres du genre des Derniers Masques, de M. Arthur Schnitzler, qui accom- pagnait Dardamelle. Ce malade d'hôpital, qui va mourir et le sait, et qui demande avoir son plus ancien ami pour lui révéler qu'il a été l'amant de sa femme, et qui, devant les bonnes paroles de cet ancien ami, renonce à lui faire sa révélation, après avoir auparavant répété la scène avec une sorte de jeune phtisique fantasque et trépidant ! Cela me paraît fabriqué en diable.

On a joué à la Renaissance une nouvelle pièce de M. Charles Méré, qui s'est fait connaître par une petite oeuvre dramatique fort pittoresque : les Trois Masques, tirée d'ailleurs par lui d'une légende corse. Cette nouvelle pièce a pour titre La Femme },ias- qiiée. C'est absolument sans le moindre intérêt. Cela relève tout au pliis du cinéma, tel qu'il est et tel qu'on l'a fait, et je n'en- tends pas là faire son éloge, je ne me cache pas de le dire. Quand je lis dans les journaux toutes les tirades qu'on fait sur le cinéma et qui ne cachent que des intérêts commerciaux, je plains les naïfs qui croient aux belles paroles d'art qu'on leur prodigue à cette occasion. Le cinéma est devenu uniquement l'apothéose du cabotinage et du roman-feuilleton, quand il aurait pu être un spectacle du plus haut intérêt et de la plus grande utilité. La nouvelle pièce de M. Charles Méré y trouve- rait sa place toute naturelle. Si c'est là tout ce qu'on peut attendre de ce jeune auteur, il n'y a pas à lui en faire compli- ment.

Le Théâtre de l'Œuvre a repris Uhu-Roi d'Alfred Jarry. On a beaucoup parlé, et de différentes façons, tous ces derniers temps, de cette œuvre et de son auteur. J'ai vu, pour ma part, Uhu-Roi, autrefois, au Théâtre des Pantins, rue Chaptal, chez le musicien Claude Terrasse, joué au moyen de marionnettes mises en mouvement par Jarry lui-même. Lui seul avait k voix et savait les intonations qu'il faut pour donner à cette farce toute sa saveur caricaturale et bouffonne qui est réelle, et, à certains endroits, d'un caractère très humain. Je l'ai vu ensuite

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