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NOTES 495

femme envisage l'être déterminé de celui qui va venir, et sa pensée va frapper dans les limbes une âme singulière. » La phrase est volontiers brève ; l'image introduite pour l'explica- tion de l'idée, non pour elle-même. Un certain lyrisme l'anime presque toujours.

Je ne sais si la génération qu'exalte État-Civil — elle a trente ans aujourd'hui — satisfera aux espoirs de son panégy- riste. Une autre génération vient, qui la trouvera surannée. Plus qu'en elle, j'ai confiance en Drieu la Rochelle. C'est un écrivain original et vigoureux. Il rapporte un trait de sadisme singulièrement piquant : le supplice d'une poule par un enfant. Puisqu'il a compris l'importance de ce trait, et même si son énergie s'est maintenant tournée vers un autre côté, on peut attendre de lui des expériences et des cris bien curieux.

MARCEL ARLAKD

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��LE BAISER AU LÉPREUX, par François Mauriac (« Les Cahiers verts », Grasset).

Le talent cïe M. Mauriac, un peu fumeux et trouble, apparaît dans cette nouvelle que publient les Cahiers Verts, décanté et discipliné, sans avoir rien perdu de ses richesses. Le poète que fut M. Mauriac à vingt ans n'est point mort, mais il ne se mêle plus d'influencer le prosateur qu'il est devenu. Quand on dit d'un roman : roman de poète et qu'on a raison de le dire, ce roman est mauvais. L'art du conteur est antagoniste de l'art du poète.

Dans le Baiser au Lèprenx, M. Mauriac s'est délibérément voulu conteur. Cette histoire d'un jeune homme laid, malingre, impuissant, mais riche qu'accepte pour mari une jeune fille belle, pleine de santé et de vigueur, mais pauvre, aie profild'un conte de Maupassant. Dans le détail, le dénouement excepté — c'est le sujet même de Thérèse Raquin. Chez Zola la mère infirme, chez Mauriac, le père malade et maniaque ; chez tous les deux, le fils gringalet et la belle fille robuste ; chez tous les deux. Vautre, sanguin et brutal. Mais tandis que chez Zola, c'étaient les plus bas instincts de la nature humaine qui triom- phaient, conduisant Thérèse et son amant au crime ; chez Mau- riac, ce sont les plus hauts sentiments qui triomphent. Non seu-

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