NOTES 493,
Nul agenouillement prématuré devant un cadavre jeune et connu ne l'a replié sur lui-même. Il n'est timide que dans la mesure où le sont d'ordinaire les enfants. Il ignore à peu près les hontes, les subtilités, les atroces pudeurs — où d'autres- jeunesses se sont complues.
Le voici en Angleterre, où des jeunes filles et de jeunes hommes ont des gestes harmonieux et sains. Cet adolescent, poreux à toutes sensations, s'émeut de vivre. Déjà à trois ans : « Le cuir sent bon. J'y écrase mon nez. Encore cette fraîcheur. » L'impression présente seule compte : « Il n'est que ce soleil qui s'échauffe en moi à cette heure. Je suis l'astre solitaire qui illu- mine le monde. » Quoi d'étonnant, quelques lectures aidant, qu'il renie son bref passé, ses précédentes émotions et ne soit plus qu'un corps avide de liberté. Toutes réserves, encore une fois, sur les conséquences et l'enracinement de ce nouvel état d'âme.
Un des soucis principaux de la critique doit être de situer l'écrivain dans son époque et de l'y rattacher par sa ressem- blance ou son éloignement. De son propre témoignage, Drieu la Rochelle finit une époque et marque le commencement d'une- autre. Il n'est de l'une ni de l'autre — de toutes deux pourtant. Aussi m'apparaît-il si attrayant.
Deux influences ont marqué notre âge. Je croyais l'une un peu effacée. Pourtant M. Barrés semble avoir donné, janséniste porte-parole de Nietzsche, plus d'une directive à Drieu la Rochelle. Éfat-Civil n'est pas si loin qu'on pourrait le penser de V Homme Libre, ne serait-ce que par un même culte de la volonté, une intelligence aiguë qui ne supprime pas la sensibilité, aussi un certain réalisme romantique.
Mais cette invitation à la liberté, au grand air, voire à l'anar- chie, nous l'avions entendue. Elle est dans les Nourritures et dans tout Gide. Cette adoration même de la forme cor- porelle n'est-elle pas exaltée dans Vlmmoraliste. Mais où Gide ne voit sans doute qu'un caprice, Drieu la Rochelle se fixe un but.
Deux sortes de disciples de Gide peuvent être constatés. Chez les uns, il a surtout insinué un goût passionné pour certaines amoralités, certaines expériences psychologiques, d'une pratique dangereuse et fort charmante. Lafcadio a maintenant appris-
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