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NOTES

��LA POÉSIE

L'AGE DE UHUMANITÉ, poème, par André Salimn, avec un portrait de l'auteur par Marie Laurencin (N. R. P.).

J'ai relu plusieurs fois ce poème de M. André Salmon, non snns y découvrir de nouvelles beautés, ce qui prouve qu'elles sont assez nombreuses, et aussi de nouvelles significations, ce qui me laisse en définitive un doute sur le dessein du poète. Il y avait dans Prika\ une forte unité intérieure qui ne sera pas ressentie par le lecteur de l'Age de l'Humanité, soit que le sujet même de ce film épique offre des contours trop flous, soit que M. Salmon, soucieux de décevoir des zélateurs indésirables et de décourager les classificateurs politiques, ait excessivement nuancé sa pensée. Aussi parait-elle semblable à Loïe Fuller que peignent les faisceaux chatoyants et qui, le jeu fini, ne laisse en nos yeux que le souvenir de la forme blanche qu'elle est redevenue, non par prudence, certes ou crainte de se compro- mettre (André Salmon est bien l'écrivain le moins accessible à un sentiment de cette espèce), mais il règne dans son esprit un tyrannique désir d'indépendance et un appétit insatiable de singularité.

Rien d'étonnant si l'aube des temps nouveaux comme l'on dit, s'offre à ses yeux sous des couleurs insolites. Là où d'autres voient blanc ou rouge, André Salmon distingue une infinité de nuances intermédiaires. Aussi nul parti politique ne saurait-il se flatter d'annexer son lyrisme. L'âge de l'Humanité qui, si je comprends bien la pensée du poète, doit succéder à l'âge des nations dont la guerre aurait marqué le couronnement, s'élabore à Paris, dans les milieux curieusement décrits par André Salmon dans ses romans, à Montparnasse, rue des Rosiers, parmi les membres du Syndicat des casquettiers ; chez un oculiste juif et polonais qui garde dans son appartement his-

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