Page:NRF 18.djvu/261

Cette page n’a pas encore été corrigée

LES REVUES 255

Voilà, je pense, l'explication du fait évident que constate M. Curtius. Quelque effort que des esprits généreux et justes « fassent pour réta- blir les ponts et les voies de communication » entre les peuples, nous sommes à un moment où chaque culture nationale se ramasse, pour ainsi dire, sur elle-n\ême, se cherche et se concentre. La culture fran- çaise se découvre psychologique et cérébrale. L'Allemagne sent qu'elle est métaphysique et intimement romantique. Elle regarde alors vers l'Extrême-Orient, vers l'Inde, qui avait déjà inspiré Schopenhauer. Cela est naturel et inévitable. D'ailleurs, pour la paix future du monde, elle eût pu plus mal choisir : sauf au Japon, les civilisations, les philo- sophies, les littératures d'Extrême-Orient ne sont point nationalistes.

En tous cas, même si les deux cultures française et alle- mande devaient aller désormais en divergeant, il n'y aurait là qu'une raison de plus pour elles de se connaître et de s'étudier, s'il est vrai qu'on ne prend jamais une conscience profonde de soi-même que par réaction contre un antagoniste.

  • *

L'ÉCOLE DES HAUTES-ÉTUDES

La linguistique et la philologie étaient, vers le milieu du xix'^ siècle, des sciences allemandes : la littérature persane était enseignée à Paris par un Allemand, Mohl ; l'assyriologie par Oppert, la philologie grecque par Weil ; pour préparer une édition du Thésaurus d'Henri Estienne, l'on faisait venir Hase d'Allemagne. C'est à l'Ecole des Hautes-Etudes et à ses premiers maîtres, Monod, Bréal, Gaston Paris, de Rougé, formés à l'école des savants allemands, que la philologie française doit son existence et son rayonnement.

M. Meillet écrit dans la Revue de France (15 Janvier), à l'occasion du cinquantenaire de cette Ecole :

C'est un de ses maîtres, G. Maspéro, qui a été durant plus de quarante ans le chef de l'égyptologic en France et en Egypte ; c'est un de ses maîtres qui a tiécouvert et publié le code célèbre d'Hammou- rabi ; c'est un de ses maîtres, James Darraesteter, qui a renouvelé la philologie de VAvcsta, et ce sont des hommes formés à l'École des Hautes-Études qui, en organisant l'École d'Extrême-Orient, ont donné à la France une place éminente dans l'étude de l'Asie. Une œuvre d'importance nationale, comme X Atlas linguistique de la France, est due tout entière à l'École des Hautes-Études.

�� �