M. Curtius a également protesté contre une grave mésinterprétation de sa pensée, dans l’article que M. Muret consacrait dans les Débats à son livre sur Maurice Barrès. Cette protestation qui parut dans des journaux allemands n’a été reproduite, que je sache, dans aucun journal français. C’est ainsi que chez nous les faux jugements s’accréditent. La N. R. F. s’efforcera toujours de remettre les choses au point, estimant qu’elle sert ainsi la France mieux qu’en soufflant sur les passions.
DÉSOBÉIR, par Henry Thoreau. Traduit de l’anglais par Léon Bazalgette (Rieder).
Léon Bazalgette a traduit Whitman. Louis Fabulet a traduit Kipling. Avec André Gide et Valéry Larbaud, ce sont eux qui ont le plus fait depuis vingt ans pour répandre chez nous la connaissance de la littérature anglo-saxonne moderne et contemporaine.
Rien de plus justifié que la fière protestation de Fabulet, exclu des cérémonies de la Sorbonne en l’honneur de Kipling. Il a fallu la guerre et les crédits de la propagande officielle pour informer nos maîtres de l’enseignement supérieur, titulaires de chaires de langues vivantes, qu’il y avait des hommes vivants dans les pays qu’ils étaient chargés d’étudier et que leur tâche n’était pas uniquement besogne de nécrophore.
Aujourd’hui c’est l’Américain Henry Thoreau (1817-1862) dont la leçon nous est proposée. Et ce n’est point par quelque professeur spécialiste, c’est encore par Bazalgette et Fabulet. Désobéir, que publie Bazalgette dans la collection des Prosateurs Étrangers Modernes qu’il dirige, est un recueil d’essais choisis dans toute l’œuvre de Thoreau. Fabulet donnera prochainement aux éditions de la Nouvelle Revue Française une traduction de Walden, le plus important ouvrage de Thoreau.
Il est donc, avant d’avoir lu Walden, assez difficile de juger tout ce que Thoreau peut apporter de salubre et de tonifiant soit aux simples lecteurs, soit aux écrivains français. Car c’est cela que nous annonce Bazalgette dans son Introduction. Mais on peut s’en faire une idée déjà assez nette en lisant Désobéir. Il se dégage de tous ces essais une impression de santé intellec-