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226 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

LE CYGNE ANDROGYNE, par Joseph Ddteil (Images de Paris).

M. Joseph Delteil est fort capable d'écrire un jour d'excel- lentes choses. Voici de lui une impression rhénane qui n'est pas sans ingéniosité :

Une femme de circonstance Passe sept fois sur un pont nain. Des courtisanes de Mayence Sifflent un air contemporain. ... Un due couronné d'épines Brait sur un mode primitif...

Mais l'auteur se satisfait rarement d'un style aussi simple. Il est question dans ses vers de « vent théologal qui flagelle les reins », de « besaces d'ombre qui pendent à des âmes » et d'autres objets non moins cocasses. Le titre du recueil est à lui seul une trouvaille.

Ecoutons cependant chanter les filles de Crète qui viennent « attester au ciel pur » leurs « amples cœurs de monstres » :

Nous venons, dieu Cretois, en tumulte, t'oj^rir Nos seins vertigineux et des drachmes de cuivre, Et t'orner de soupirs, et te Jaurer d'olives. Et brandir à Iras tors nos thyrses de roseaux. Afin que ta faveur, dkeu d'outrance, bientôt. Accorde, un soir de Sacre, à nos fièvres insignes L'étreinte des Taureaux ou le baiser des Cygnes.

Voilà sans doute des façons de s'exprimer fort ridicules ; est-il certain qu'elles eussent paru telles il y a quinze ans, et avec une pareille évidence. M. Joseph Delteil a découvert la poésie dans le faux Bois sacré de M. Henri de Régnier, aux nymphes fardées par M. Raphaël Collin, de l'Institut. Le ton qui régnait en ces lieux nous paraît aussi lointain que les tournures et les petits chapeaux haut-perchés. Il est probable que le matériel emprunté aux llluminalions par des débutants mieux informés des modes du jour que M. Delteil connaîtra bientôt semblable décri.

ROGER ALLARD

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