MA MÈRE ET LES LIVRES iSl
que : Aphbicécladiggalhymaroidphorebstevanxy. Que j'aimai ce Guizot, de vert et d'or paré, jamais déclos ! Et ce Voyage d'Anacharsis inviolé ! Si l'Histoire du Consulat et de l'Empire échoua un jour sur les quais, je gage qu'une pancarte mentionne fièrement son « état de neuf»...
Les dix-huit volumes de Saint-Simon se relayaient au chevet de ma mère, la nuit ; elle y trouvait des plaisirs renaissants, et s'étonnait qu'à huit ans je ne les partageasse pas tous.
— Pourquoi ne lis-tu pas Saint-Simon ? me deman- dait-elle. C'est curieux de voir le temps qu'il faut à des enfants pour adopter des livres intéressants !
Beaux livres que je lisais, beaux livres que je ne lisais pas, chaud revêtement des murs du logis natal, tapisserie dont mes yeux initiés flattaient la bigarrure cachée... J'y connus, bien avant l'nge de l'amour, que l'amour est com- pliqué et tyrannique et même encombrant, puisque ma mère lui chicanait sa place.
— C'est beaucoup d'embarras, tant d'amour, dans ces livres, disait-elle. Mon pauvre Minet-Chéri, les gens ont d'autres chats à fouetter, dans la vie. Tous ces amoureux que tu vois dans les livres, ils n'ont donc jamais ni enfants à élever, ni jardin à soigner ? Minet-Chéri, je te fais juge : est-ce que vous m'avez jamais, toi et tes frères, entendue rabâcher autour de l'amour comme ces gens font dans les livres ? Et pourtant je pourrais réclamer voix au chapitre, je pense ; j'ai eu deux maris et quatre enfants !
Les tentants abîmes de la peur, ouverts dans maint roman, grouillaient suffisamment, si je m'y penchais, de fantômes classiquement blancs, de sorciers, d'ombres, d'animaux maléfiques, mais cet au-delà ne s'agrippait pas, pour monter jusqu'à moi, à mes tresses pendantes, conte- nus qu'ils étaient par quelques mots conjurateurs...
— Tu as lu cette histoire de fantôme, Minet-Chéri ? Comme c'est joli, n'est-ce pas ? Y a-t-il quelque chose de plus joli que cette page où le fantôme se promène à
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