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LE SECRET DU POLICHINELLE 83

Il s'arrêta. Chaque mot le blessait ; il y retrouvait tout le verbiage, toute la fausse enfance, toute la déshonorante feinte dont il souffrait depuis un jour. Il reprit très vite :

— V Innocence au milieu de nous, quelle largesse ! Quel don du ciel ! Qui sait les conseils de sagesse, Les éclairs de honte, qui sait la foi, l'amour, Que versent, à traveis leur tremblant demi-jour, Dans la querelle amère et sinistre où nous sommes, Les âmes des enfants sur les âmes des hommes t

Ici la voix lui manqua. Son regard d'indignation et de détresse vacilla sur tous ceux qui l'écoutaient convaincus et recueillis. Et son cœur crevant enfin, il leva les poings et cria : ' •

— Hypocrites ! menteurs ! lâches !

— Victor I exclama la tante Marie berçant Lucienne en larmes.

Marceline se leva et prit son frère par le bras.

— Ah, s'écria M. Saintour, voilà qui est un peu fort ! Marie, halte, ceci est mon affaire. A qui donc en as-tu, petit imbécile !

Il tourna des yeux menaçants vers Victor. Mais il ne pouvait plus l'intimider : l'enfant continua dans une fougue désespérée.

— A toi, à vous, tas de menteurs ! i « Moi, je n'ai pas le droit d'avoir du chagrin ? Il faut quet

je sois content parce que vous êtes contents ? Il faut que- je m'amuse parce que c'est ma fête ?.... Et si j'ai de la peine, moi ?

— Victor, Victor, répétait Marceline éperdue.

— Si je suis votre polichinelle, criait-il, il fallait me le dire ! Vous vous moquez de moi à cause de vos mensonges 1 Si vous ne les aviez pas faits, je ne les répéterais- pas ! Je; suis un poupard qui dit papa-maman.... 1

Sa voix se rompit encore. Les larmes couviuiênt son- visage. Comme personne n'osait plus parler, U gémît tdut ce qu'il avait pensé.

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