JEROME ET JEAN THARAUD 569
agencés de mille et une façons : des paysages, des anec- dotes, des argumentations et quelques synthèses. Le Transvaal, le Limousin, l'Algérie, le Sahara, la Charente, la Dalmatie, le Mont Athos, la Côte d'Azur, l'Ile-de-France, la Galicie, la Champagne, les Flandres, le Maroc, l'Ukraine, la Hongrie, tels sont les grands décors qui restent dans la mémoire, les livres des Tharaud fermés, et ils suffisent à eux seuls à élancer la rêverie dans des directions si mul- tiples et parfois si nouvelles qu'ils mériteraient déjà à eux seuls d'assurer une renommée d'écrivain.
Décors scrupuleusement exacts où s'émeuvent les grands débats des races et des religions chers aux Tharaud. C'est Paul Souday qui faisait remarquer après la Fête Arabe et la Bataille à Sciitari que les sujets choisis par les deux frères contenaient la matière de grandes discussions parlementaires : l'un, sur l'Algérie, l'autre, sur Constanti- nople et le Proche Orient. La remarque est fine et juste, mais elle n'est tout à fait exacte qu'à la condition de consi- dérer la contribution des Tharaud à ces discussions comme purement romanesque et légendaire et point du tout comme ayant la moindre valeur historique ou pra- tique.
C'est d'ailleurs le plus grand éloge qu'on puisse faire d'un romancier, puisque créer du romanesque est son premier devoir et édifier une légende la marque de sa plus belle réussite. (Quoi de plus enviable pour un romancier que de laisser derrière soi la légende d'un Julien Sorel ou même d'un Tartarin de Tarascon ?) Ce n'est pas de l'his- toire des religions que nous attendons des Tharaud, c'est du « roman des religions ».
La Fête Arabe n'explique pas plus l'Algérie que Dinghy n'explique Kipling, la Vie de Dcroiilède Déroulède ou la Tragédie de Ravaillac Ravaillac. Les Tharaud n'évitent jamais, parce qu'ils sont de vrais artistes, de déformer leurs modèles.
Les Tharaud se sont d'ailleurs défendus, sauf erreur.
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