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520 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Certes il est désirable et beau de jeter des ponts par-dessus les abîmes des haines nationales, et de préparer les voies d'une réconciliation européenne. Mais si cela n'est possible qu'au prix du sacrifice de toutes les profondeurs et de tous les sommets de l'âme, et à la condition d'accepter les doctrines insipides de quelque association de libres-penseurs — alors plutôt y renon- •cer, et se tenir à l'écart d'une activité qui demande comme con- dition première un sacrifiTJo deU'iutelktto. Nous ne devons pas acheter la défaite du nationalisme au prix d'une domestication <ie l'esprit. Tendons-y ; mais par d'autres chemins.

Nous ne voulons pas, nous ne devons pas nous laisser acculer à l'alternative du nationalisme ou de l'internationalisme. Tant que cette alternative pernicieuse et trompeuse ne sera pas écar- tée, tout effort d'apporter clarté et assainissement dans les rap- ports intellectuels franco-allemands fera faillite. Tant qu'elle ne sera pas dépassée, nous resterons à un point mort — tant que nous n'aurons le choix qu'entre un étroit repliement sur nous- mêmes, et d'indignes concessions.

Enfin une voix d'outre-Rhin nous encourage et nous rassure — car nous, ne pouvions considérer comme porte- parole de l'Allemagne tel adhérent allemand aux doctrines «du groupe Clarté, non plus que les adhérents français de ce groupe ne pouvaient prétendre parler au nom de la France. Et peut-être cette voix n'est-elle ni la seule, ni la première qui parle ainsi : je m'excuse auprès de ceux que je n'ai pas entendus. Curtius souhaite, autant que nous le pou- vons souhaiter, une reprise des relations intellectuelles entre les deux pays ; mais ces relations lui paraissent et nous paraissent également, inadmissibles, s'il faut qu'elles soient basées sur une préalable dénationalisation de l'in- telligence. J'ai déjà maintes fois exprimé mon opinion sur ce point, et l'on pourra la retrouver éparse au cours du volume de Pages Choisies que la Nouvelle Revue Française vient de faire paraître. « Nous voyons de mieux en mieux à quel point nationalisme et internationalisme sont au- jourd'hui des termes non point vides, mais lourds et dan- gereux, et comme on arrive vite au bout de leur sens

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