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5 lé LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Puis il parle de ce « danger pour l'esprit français, pour la pensée française, qui perdraient bien vite par les procédés en cours, d'abord leurs qualités de mesure et de goût, puis leur clientèle naturelle »... Car, outre la ruineuse infatuation du pays qui le pratique, ce système de boycot- tage, de protectionnisme outrancier et de volontaire aveu- glement, présente un autre danger : le détournement progressif des regards de l'autre paj^s. L'attention, la curio- sité, les convoitises de l'Allemagne, aujourd'hui se détour- nent vers l'Est ; et bien naïf serait celui qui n'y verrait qu'avantage pour la France ! Ici je céderai de nouveau la parole, et laisserai parler l'Allemagne elle-même. L'article que je vais citer copieusement a paru dans le Neiie Merktir de juin dernier k L'auteur de cet article, Ernest Curtius, s'était déjà signalé à notre attention par un remarquable livre, suite de conférences sur les nouvelles directions de de la pensée française — dont la Nouvelle Revue Fraîîçaise a dernièrement rendu compte. Ecoutons-le :

L'aspect du problème intellectuel franco-allemand, aujour- d'hui, n'a plus rien de commun avec ce qu'il était en 19 14. La génération est éteinte qui aurait pu fournir les supports d'un nouveau lien organique entre les deux cultures. La génération nouvelle a de tout autres bases d'expérience. La jeunesse intel- lectuelle de l'Allemagne de 1921 n'apporte plus au problème des relations psychologiques avec la France l'intérêt vivant d'avant la guerre... La jeune Allemagne regarde vers l'est, tour- nant le dos à l'Occident. Ceci indique un revirement décisif. De tout temps, sortir de soi-même, fut une des nécessités de l'esprit allemand, qui ne parvient à sa forme qu'après une fécondation venant d'ailleurs. Mais là où cette tendance reste vivante (c'est-à-dire là où elle n'est pas refoulée par un nationa- lisme de culture, pédant et vieilli) les esprits se tournent vers la Russie, et au-delà, vers les Indes et la Chine. Les sympathies que le bolchevisme rencontre auprès de notre jeunesse, ne sont

I. La Reviie Rhénane d'octobre l'a reproduit in-extenso dans une excellente traduction que nous eussions certainement utilisée ici, pour nos citations, si elle nous eût été connue plus tôt.

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