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NOTES 491

comment, dans une âme d'artiste, naissent et se développent les visions symboliques.

Les origines psychologiques du symbolisme nouveau sont certainement complexes. Il me paraît cependant possible de dégager un fait essentiel, qui, une fois bien établi, nous permet- trait, je crois^ de mieux préciser certains caractères de la littéra- ture contemporaine.

Le poète naïf parle peu de la vie qu'il ne prétend pas avoir épuisée et dont il n'extrait pas l'essence sous forme de symbole. Cela change, quand le poète se trouve devant une littérature déjà toute formée ! Il lui sera facile alors de résumer la vie sans même l'avoir vécue, par pure anticipation littéraire. Les femmes, l'amour, la gloire, le péché, la mort : il aura déjà vu tout cela, dans ce grand livre d'images que représente pour nous tous la littérature. Fermant le livre, il dira: voilà la vie, et, doué d'un certain esprit et de quelque imagination, il saura nous la représenter en raccourci et développer tantôt telle thèse, tantôt telle autre. Le symbolisme compris d'une certaine manière, aura toujours des origines littéraires ; c'est une littérature au second degré. Le poète, en créant des symboles, travaille sur des ima- ges, et sur des idées toutes faites.

Le fait que je viens de signaler me semble avoir son impor- tance pour quiconque cherche à comprendre et à situer les oeuvres de la littérature contemporaine. Mais avant d'essayer d'en dégager les conséquences, je voudrais résumer la thèse que, dans sa trilogie, M. Werfel nous développe, au moyen de sym- boles, et montrer les préoccupations auxquelles elle répond.

M. Werfel nous enseigne qu'il faut détruire son moi. Le cou- vent dans lequel Thamal finira une vie, désormais bienheu- reuse, se trouve quelque part aux Indes. Le poète, comme tant d'autres de sa génération, en ce moment, se déclare pour la sa- gesse hindoue. Ce qu'il y cherche, c'est une solution au problème, certes toujours angoissant, de l'être et du paraître, de l'homme rei qu'il est, et de l'homme tel qu'il se voit au moyen d'un miroir.

Le pro.blème est ancien. Rousseau lavait posé pour les mo- dernes. L'homme civilisé se dédouble ; il y a son moi réel et son moi fictif ; pour savoir ce qu'il est, il faut qu'il sache ce qu'il représente, comment il est vu par les autres et le rôle qu'il joue

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