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^82 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

ressouvenir. Nous avons vite fait d'oublier Gabrielle, mais George Moore est toujours avec nous.

��PERCY LUBBOCK

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��MESURE POUR MESURE, de Shakespeare, traduit et préfacé par Guy de Potirtalès (Société littéraire de France).

Ce texte est celui que, l'hiver dernier, Pitoëfî" a utilisé pour monter à Genève Mesure pour Mesure. La traduction de M. Guy de Pourtalès est aisée. Une soigneuse confrontation avec l'ori- ginal pourrait seule nous apprendre si nous pouvons la consi- dérer comme définitive. A première vue, on souhaiterait plus de rythme et d'accent dans le rendu de certains passages lyri- ques où brusquement Shakespeare fait intervenir le mètre régulier et même la rime. Mais il faut un coup de génie pour trouver des équivalents à de si surprenantes beautés ; et mieux vaut en laisser quelque peu pâlir les couleurs tout en en res- pectant le dessin, que de perdre dessin et beauté pour avoir imprudemment prétendu calquer l'original. Une pièce de Sha- kespeare continue d'exister, même dépouillée de ses ornements, pourvu qu'on n'en altère pas le mouvement et la vie. M. Guy de Pourtalès a su conserver à cette comédie son atmosphère voluptueuse et sanglante, son élan, et cette vérité essentielle qui luit si curieusement sous l'apparente invraisemblance de l'affabu- lation. Et il a trouvé moyen de garder aux scènes bouffonnes leur grande saveur.

Mesure pour Mesure est une des pièces les moins populaires de Shakespeare, sans doute parce que le point de départ en paraît assez saXigrenu. On prend difficilement au sérieux l'expérience tentée par ce Duc indulgent, qui se retire du monde pour confier à son lieutenant le soin d'appliquer, avec une rigueur féroce, les vieilles lois contre la débauche, qu'il a lui-même laissé tomber en désuétude. On conçoit mal que la vie»du malheureux Claudio soit réellement menacée parce oue sa fiancée se trouve enceinte avant la consécration des noces, alors que tout le monde d'aigrefins et d'entremetteuses qui circule dans la pièce s'en tire avec des châtiments assez doux. Il est probable, en outre, que la tonalité générale de l'œuvre, très trouble et charnelle, en a rendu la représentation

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