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450 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

autres, quand tel d'entre eux était en scène, le débiner à qui mieux mieux, pour le couvrir de compliments à sa sortie. Ajou- tez que je circulais au milieu de tout ce monde à l'aise comme chez moi, et que, si je parlais peu, déjà de nature timide, je savais regarder, écouter et retenir. Comment diable l'illusion me serait-elle restée ? Il aurait fallu avoir une dose extraordi- naire d'idéalisme, et l'idéalisme n'a jamais été mon fort, non plus que l'admiration, je crois bien. Je n'en ai donc gardé aucune, et depuis longtemps je n€ suis plus au théâtre, à ma place dans la salle, qu'un spectateur plus littéraire que dramatique, plus obsen,'ateur que passionné, suivant là, souvent, comme partout ailleurs, ma propre rêverie. Je regrette quelquefois d'avoir quitté cette fréquentation des coulisses. Je n'ai pas grande admi- ration ou sympathie pour les comédiens. La fatuité qu'ils ont, l'importance qu'ils étalent, et qui les gâtent, à mes yeux, dans un métier qui devrait être une fantaisie perpétuelle, me les fait peu rechercher. J'ai toujours préféré de beaucoup les comédien- nes. A mon avis, le théâtre ajoute à la femme, et elle est comme faite pour lui. Il est également à remarquer que les femmes gar- dent là beaucoup plus de simplicité et de naturel que les hommes. Je songe, quand mon regret me prend, au plaisir que j'aurais à flâner là au milieu de femmes charmantes, parées, vives, encore embellies par l'artifice, adroites à plaire en gestes et en paroles. De toutes pareilles, — la tradition est une si belle chose, — mirent dans mon enfance des moments délicieux. Je me dis que ce serait encore mieux aujourd'hui. Le fâcheux, je crois bien, c'est que, depuis ce temps-là, elles se sont diablement embour-

��geoisées.

��Je ne vais donc plus au théâtre que dans la salle, et j'ai parlé plus d'une fois du peu de plaisir que j'y trouve souvent. Il y a à cela plusieurs raisons. D'abord les pièces carrécnent mauvaises, fades, bavardes, sans intérêt ou d'un intérêt complètement usé, ces pièces à tirades, à discours, dans lesquelles l'auteur prêche, moralise, dogmatise, veut enseigner ou convertir, se prend au sérieux et tombe dans la bêtise, ces pièces, par exemple, dans lesquelles M. François de Curel, vrai parvenu de la littérature dramatique, s'est révélé un maître. Ou ces pièces soi disant sur l'amour, sur la passion et qui ne sont qu'inventions perverses et artificielles, fausses dans le fond comme dans l'expression, sans

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