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432 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

de travaux, de changements, d'aménagements. Le sentiment humain le plus fort correspond sans doute à la conquête la plus importante. Nul repos pour ce poète. Le spectacle de champs mal cultivés ou remplis d'herbes folles est doulou- reux pour le paysan. Autant à dire de toute œuvre com- mencée ; mais l'œuvre paysanne a ceci qui lui est propre, c'est qu'elle est sans fin. Les saisons renouvellent l'appel de la chose et de l'outil.

A cela s'ajoute toujours l'idée que d'autres hommes attendent, et comptent sur l'ouvrier. Je suis attendu, cela me tire et m'éveille. Et, conformément aux principes, l'idée la plus puissante n'est pas ici la plus éminente, à savoir que le travail des autres va se trouver plus pénible si je leur manque; au contraire, l'idée cuisante, c'est que le travail sera fait par d'autres, et avQc bonheur. L'idée insupportable c'est qu'on sera remplacé et même oublié ; c'est une espèce de mort. C'est ce qui tourmente dans la mahdie; et la vraie consolation est de dire : « On vous attend ; on ne peut vous remplacer. » Le devoir, pour la plupart, n'est autre chose que cette place vide qui attend l'homme, et cette opinion qui regarde l'horloge. La gloire, c'est d'être attendu ; l'acclamation le fait entendre, et chaque emploi a sa «loire.

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��LA RELIGION ET LE METIER

L'irréligion des prolétaires s'explique déjà par les causes qui ont été examinées. Je pense ici au parfait prolétaire, à celui qui ne dépend en son travail que de machines, et par conséquent que de son propre savoir-faire. On comprend bien que la prière d'un tel homme revient naturelle- ment à lui-même. D'autres causes sont à examiner, et principalement le genre de vie que la machine à vapeur a imposé aux ouvriers d'usine, villes industrielles, loisir et travail brutalement séparés, familles dissociées par le travail industriel, foyer triste, sans passé et sans racines.

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