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NOTES 209

surnaturaliser notre christianisme déchu » et pour racheter les erreurs de notre race.

Ce n'est pas des hommes ni d'aucun principe de droit humain que Léon Bloy attend la fin des guerres qu'il ne peut espérer que de l'avènement du Christ glorieux et du règne de Dieu sur la terre. En attendant cette théocratie et la perfection de la Ré- demption, le manteau du blanc Cavalier apocal3'ptique sera toujours taché de sang. Comme Joseph de Maistre il juge la guerre à la fois satanique et divine, fruit de la perversion humaine et moyen de réintégration. Comme le philosophe russe Soloviev (dont il est particulièrement intéressant dans les circonstances actuelles de relire les Trois Entretiens) il repousse la théorie de la non-résistance absolue au mal. Il y voit un effroyable abus de l'Evangile et, allant sans doute trop loin dans l'excès contraire, il voit, nous l'avons vu, dans la haine un devoir. Il reconnaît pourtant qu'à cette œuvre de sang ne doivent pas collaborer comme soldats les ministres de Dieu. Se souvenant que l'Eglise ahhorret a sanguine, il fut, dans une méditation fort découpée par la censure d'alors, un des rares catholiques (je me souviens d'avoir lu dans quelque Croix la lettre d'un curé mobilisé qui déclarait trouver une joie intense « à tirer les boches comme des lapins ») à protester contre ce désordre « sacrilège » : des prêtres-soldats, désordre permis par « le reniement judaïque des Princes de l'Eglise » et par « le désastre des âmes si complet de nos jours ».

Le style de Léon Bloy dans ces quatre derniers livres n'a rien perdu de son énergie et de ses chaudes couleurs. C'est toujours celui du « Vociférateur » mais plus souvent adouci par une gravité recueillie. Plus que jamais Bloy, selon une de ses belles images, « marche en avant de ses pensées en exil dans une grande colonne de silence ». Plus que les autres aussi ces derniers livres sont une sorte de confession où l'on pourrait trouver comme dans celle de Rousseau un singulier mélange d'humilité et d'orgueil. Mais en somme, à part quelques excès bien humains de vanité parallèles à certains excès de style, cet orgueil et cette humilité ne sont-ils pas imposés par une foi qui nous fait connaître à la fois notre indignité et notre valeur infinie ? A la plus haute ambition le croyant n'est-il point in- vité ? Nous sommes tous appelés à la sainteté, déclare Bloy,

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