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190 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

eut une équipe de Durkheim, lui fut refusée. Et il est pro- bable que, même si les philosophes de la montagne Sainte- Geneviève avaient prononcé le dignus intrare, peu de jeunes historiens eussent été disposés à braver, en se rangeant sous ia bannière d'un philosophe, et passant ainsi à l'ennemi, les foudres de maîtres éminents. Le discrédit de philosophie de l'histoire, tant chez les historiens que chez les philosophes, dure encore .

Eclipse qui cependant n'aura qu'un temps. L'esprit ne cessera pas plus de spéculer sur la durée de l'humanité, c'est-à-dire sur l'histoire, que sur la durée de l'individu, sur l'espace d^une vie humaine. Et, même, éclipse partielle, dès maintenant. Ces spécu- lations trouvent tout de même un public, se font une place entre les dédains des philosophes et ceux des historiens. Il existe à l'Académie des Sciences morales et politiques une Section d'his- toire générale et philosophique, et, bien que M. Seillière, qui est de l'Institut, appartienne à la section de Morale, c'est pour- tant à l'ordre de l'histoire philosophique qu'appartiennent tous ses travaux.

Ces travaux jusqu'ici trouvaient plus de lecteurs en Allemagne qu'en France. Il y a chez M. Seillière un certain poids germanique, il a besoin de beaucoup d'espace pour s'expliquer, et il manque de trait. Le commun des lecteurs français a de la peine à sortir de ses grands li\Tes sérieux, intelligents, lumineux, un peu d'une lumière d'atelier, de sa Philosophie de Flmpéria- lisme, de son Féitelon, de son George Sand. On y chemine par étapes sur une route où les guinguettes manquent. Il faut pren- dre d'abord contact avec lui par ses ouvrages les' plus courts. Son Flaubert qui se lit d'un trait est une œuvre de psychologie remarquablement solide. Quant à ses idées directrices elles se résument facilement en quelques pages, et M. René Gillouin lui a rendu un grand service en écrivant ces pages sous le titre de Une Nouvelle Philosophie de V Histoire Moderne et Française. La clarté, la sincérité, le goût de la mesure et du vrai se révèlent dans le livre de M. Gillouin, mais il parle plus en disciple qu'en critique : « Ce que nous avons voulu considérer en M. Seillière, c'est le théoricien le plus satisfaisant que nous connaissions de la fondation de l'ère moderne, c'est le philo- sophe admirablement compréhensif des grands courants d'idées

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