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PRÉFACE A « ARiM ANCE » 1 3 I

Impuissant ; ses gestes, ses actions le laissaient entendre ; mais on pouvait douter, car le roman entretient savamment le mystère. Par deux fois Octave est près délivrer son secret à celle qu'il faut bien pourtant appeler sa maîtresse ; mais d'abord le cœur lui manque et plutôt que d'avouer cela, il sert, en aliment à la curiosité qu'il éveille, un autre secret, honteux, mais moins infamant à ses yeux, une faute ancienne, imaginaire ou réelle et « dit à son amie que, dans sa jeunesse, il avait eu la passion de voler » ; mais l'on sent bien que ce n'est là qu'une feinte, qui pourtant suffit à bouleverser Armance et à désorienter le lecteur.

Et plus tard : — « Eh bien ! dit Octave en s'arrêtant, se tournant vers elle et la regardant fixement, non plus comme un amant, mais de façon à voir ce qu'elle allait penser, vous saurez tout ; la mort me serait moins pénible que le récit que je dois vous faire, mais aussi je vous aime bien plus que la vie. Ai- je besoin de vous jurer non plus comme votre amant (et dans ce moment ses regards n'étaient plus en effet ceux d'un amant) mais en honnête homme et comme je le jurerais à monsieur votre père si la bonté du ciel nous l'eût conservé, ai-je besoin de vous ]urer que je vous aime uniquement au monde, comme jamais je n'ai aimé, comme jamais je n'aimerai ? Etre séparé de vous serait la mort pour moi et cent fois pis que la mort ; mais j'ai un secret affreux que jamais je n'ai confié à personne, ce secret va vous expliquer mes fatales bizarreries. »

Ce secret, pourtant, il ne le dit pas encore ; il trouve plus expédient de l'écrire. Mais la lettre ne parvient pas à Armance ; elle ne connaîtra jamais ce secret — non plus que le lecteur, s'il n'a pas su le deviner.

En plus de la lettre explicative à Mérimée, nous avons, pour nous éclairer, un exemplaire d' Armance, interfolié par Stendhal lui-même, où nous pouvons lire, en regard

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