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NOTES 109

abondent en Amérique ; voici qu'à notre tour, nous en possé- dons un, spirituel, caustique, qui dégonfle à courageux coups d'épingles les mythes de Phynance. Ce n'est pas ce petit volume qui réformera les mœurs, mais c'est à force d'éveiller l'atten- tion, comme il le fait, qu'on finira par empêcher le pillage de la France par les grands établissements de crédit et le détrousse- ment des petites gens par les aigrefins.

« Les affaires, dit Jéroboam, n'ont rien à voir avec le com- merce, l'industrie ou l'agriculture. Les affaires, c'est une tour- nure d'esprit... Les affaires sont une puissante source de poésie, d'imagination, de pittoresque. Poète et financier, deux mots, une même personne. Les financiers sont des poètes ignorants.

« Les affaires ne sont pas les affaires ; les affaires, c'est le boom, c'est-à-dire l'emballement irraisonné, la fièvre mystique, le fétichisme, la foi au gri-gri.

« Ne mettez pas vos œufs dans le même panier, dit le capi- taliste français. - — Au contraire, répond l'homme d'aftaires américain, mettez tous vos œufs dans le même panier ; mais surs'eillez le panier. On voit bien que M. Carnegie ne parle pas aux capitalistes français. Car sur\'eiller le panier, c'est travailler, et en France le capital est paresseux. Etc. »

On voudrait citer presque toutes les maximes de ce petit livre. Le gros banquier Jéroboam connaît son monde et a bien de l'esprit. Souhaitons qu'il n'en reste pas là.

JEAN SCHLUMBERGER.

��PICASSO ET LE « RESPECT DE LA NATURE ».

Aucun artiste, plus que Picasso, ne requiert l'attention et ne sollicite l'étude ; nul mieux que lui ne semble fait pour décou- rager les faciles procédés d'analyse auxquels se complaît le public. Au vernissage de l'exposition Picasso, un poète habitué à reconnaître d'un seul coup d'œil, dans un salon, les œuvres de ses amis, demandait, éberlué par tant de diversité : « Mais oii donc est Picasso dans tout ceci ? » C'est une opinion com- munément acceptée que le peintre des Arlequins n'est pas encore arrivé à se « trouver », qu'il est dévoré d'inquiétudes, et que trop d'intelligence, et un œil trop opiniâtrement fixé sur soi-même l'empêchent d'acquérir cette personnalité à

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