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NOTES 95

pères-grands parce que l'antiquité ainsi présentée devait ressem- bler grandement à leur actualité même.

(A lire Amvot, Montaigne, Rabelais, d'autres, comme le R. P. de Saint-Romuald, si naïvement amusant en son Thrésor Chronologique, on croit voir que la vie antique, en son privé, pour le tour d'esprit, sinon pour les esprits et sentiments, ne différait guère de la vie de nos aïeux. Et, voire de la vie présente dans nos bourgs de campagne. Même Imaginative, même manière d'être frappé par un trait bizarre, par une phrase, même façon de peindre un personnage par anecdotes, même besoin de la légende, même puérilité bien souvent. Le grand siècle nous l'a un peu caché qui mit ses soins à proscrire le « rustique » et le « fade ». Mais Montaigne seul le dévoilerait à tous ceux qui savent quels sont au juste les souvenirs, le trésor de mémoire, d'un de nos bourgs et quelles histoires s'y content autour du feu.) • Reste que le Plutarque fut lu parce qu'il était un moniteur. L'idéal de l'honneur à la française, il contribua grandement à le former, avec les Vies des Saints et les romans de chevalerie.

Après la Révolution et l'Empire, on ne demanda plus un manuel de morale : plutôt un livre disant comment avoir de la prise sur les hommes et sur les choses ; comment prendre barre sur le destin, avec toujours de la magnanimité. Bref un livre qui semblât le propos, déjà plus proche, d'un homme supérieur naguère mêlé à de grands événements.

On eut le Mémorial de Sainte-Hélène dont Julien Sorel fit ses Heures. Le Mémorial ne pouvait connaître la vogue du Plu- tarque. Il devint populaire, — le fut-il bien ? — surtout par son côté anecdotique, ses détails sur l'Empereur exilé. On y retrou- vait lés images que les feuilles d'Epinal faisaient familières : les baraquements de Longwood surveillés par des sentinelles en habit écarlate, le jardin exotique, les roches, la mer au loin avec les frégates anglaises courant des bordées, les sites volcaniques de l'îlot.

Et depuis le Mémorial nul moniteur du même ordre ne s'est fait une fortune plus populaire.

Pourtant ? Ils sont nombreux ceux qui, faute de lettres, ou faute d'un goût pour leur pensée, pour leur style, ne peuvent demander aux œuvres de Stendhal les secrets de l'énergie. Y trouveraient-ils d'ailleurs ce qui est nécessaire à certains : de

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