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russe et que TchckhofT peint si puissamment, ce n'est que par la répétition des mêmes thèmes qu'il peut les faire comprendre. Ne nous étonnons pas qu'en ce premier essai, la curiosité du public soit allée à Tinterprétation avant de parvenir jusqu'à la pièce, jv^me Pitoëlî trouvait, dans un charmant rôle de jeune fille, l'oc- casion de faire valoir ses dons éminents de vérité, d'émotion et de fraîcheur. Quant à cet oncle Vania qui devrait incarner l'âm e même de la province russe, cet homme accablé par la mono - tonie de sa vie, jeté dans le désarroi par la présence d'une femme venue de Moscou, puis qui reprend péniblement la morne tâche oià il se sacrifie pour nourrir les vaniteux et les égoïstes de la capitale, ce personnage, le plus important de la pièce, passait au second plan par la faute de l'acteur qui en avait la charge. L'œuvre tout entière s'en est trouvée légèrement désaxée.

Toutefois cette représentation suffisait à révéler l'extraordi- naire subtilité des moyens dramatiques de Tchékhoff. Cet art manque de ramassement, de sacrifices dans l'établissement des plans ; il dédaigne ce soulignement de l'action et ce resserrement en quelques nœuds, sans lesquels notre goût de l'architecture n'est pas satisfait. Mais la manière dont Tchékhoff indique les caractères et leurs réactions, ces petites touches si justes, si révé- latrices, si rapides, n'y a-t-il pas là quelque chose qui doit plaire tout particulièrement àdes esprits français ? Nous aimons com- prendre à demi-mot, sans qu'on insiste, sans qu'on soit forcé de nous expliquer la portée d'un geste ou d'une parole. A cet égard, Tchékhoff peut nous donner de vifs plaisirs ; et, sur ce point-là du moins, il se montre un des Russes les plus proches de nous. jean schlumberger

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��L'ANNONCE FAITE A MARIE, à la Comédie-Mon- taigne.

Admirable semaine, qui nous rend coup sur coup Ariane et Barbe-Bleue et VA a nonce faite à Marie. Pour la première de ces œuvres, nous étions anxieux de vérifier nos impressions d'il y a dix ans, et un peu inquiets de savoir si nous retrouverions intact tout notre plaisir. Aucune interrogation de cet ordre ne se posait pour la seconde, car, à chaque lecture que nous en avons refaite, notre admiration n'a cessé de s'affermir. De tous

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