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6}6 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

réussissent, et ils auront remis au jour une des grandes traditions littéraires de l'Italie, celle d'un Arioste qui, reprenant après Pulci et Boiardo la matière du cycle carolingien et du cycle breton, les amalgame et en tire un univers nouveau, celle aussi d'un Pétrarque, d'un Boccace, d'un Politien, de tous les grands écrivains italiens^qui ne furent pas des écrivains patrio- tiques, mais se voulurent amuseurs, dans la plus noble accep- tion, et considérèrent l'art comme un simple jeu, mais comme un jeu divin.

Mais on voit également les dangers redoutables qui menace- raient les lettres italiennes : insincérité, académisme, pesanteur, ennui, vains exercices d'école, oeuvres de cénacles.

Aussi peut-on constater déjà un vif mouvement de réaction contre la Ronda, et souvent chez ceux-là même qui lui avaient témoigné au début le plus de sympathie. Il estencore impossible de dire si ce mouvement ennemi de l'impressionnisme facile et partisan d'un retour à un style sévère et mesuré, patiemment élaboré et orné, a déjà donné tous ses fruits ou s'il peut espérer de nouvelles floraisons.

De jeunes revues, — le Convegno, par exemple, fondé en février 1920, — semblent avoir adopté ce qu'il y avait de juste et de fécond dans la Ronda, mais sans verser dans les mêmes excès de dogmatisme et avec une moindre tendance qu'elle aux exclusives et aux excommunications. En somme, ce qui est à la mode aujourd'hui, c'est l'humanisme, un peu dilettante, mais plein de goût, dont Renato Serra avait donné le modèle savou- reux dans son petit livre le Lettere, paru en 191 3, qui n'a encore rien perdu de sa valeur, bien peu de son actualité.

Papini et Soflici, naguère de toutes les manifestations d'avant- garde, se sont isolés. Le premier, converti au catholicisme mili- tant, a terminé une Vie de Jésus qui ne va plus tarder à paraître. Soflici annonce le second volume de Lemnwvio Boreo, sorte de roman picaresque contemporain, dont le premier tome date de 191 2 ; il publie régulièrement une revue qu"il rédige seul : Rete Mediterranea. Ils restent l'un et l'autre les deux piliers littéraires de leur génération.

Le roman n'a rien donné depuis longtemps, à part les œuvres à succès de Guido da Verona, qui ait forcé l'attention du public cultivé. Tout ce qui est art littéraire (ou presque) est poème en

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