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6l8 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

l'amitié que les premières inclinations. Faut-il le plaindre ? Il meurt consolé par les illusions qu'il se fait. C'est une belle fin. Il eût, s'il avait vécu, raconté des choses bien fines, bien déli- cates, bien subtiles, car il avait l'âme tendre et profonde, l'intel- ligence déliée, un tour d'esprit original. Il savait voir, rêver sur- tout, et plaire en déroulant ses rêves. Consolons-nous. Jean Herniclin est mort. Vive monsieur de Lacretclle !

LOUIS MARTIN-CHAUFFIER

��ALBUM DE VERS ANCIENS (1890-1900), parP^w/ Valéry (Les Amis de la Maison des livres).

« Je m'abandonne à l'adorable allure : lire, vivre où mènent les mots, » écrivait M. Paul Valéry dans le même temps, à peu près, qu'il composait les poèmes égarés en des revues désor- mais introuvables et qu'on se félicite de trouver réunis dans cet album.

Les beautés n'y sont pas rares, mais on conçoit qu'un esprit aussi noble que M. Paul Valéry se soit dégoûté de leur facilité. Il sait maintenant le prix des roses et des pierreries et ne prodigue plus au hasard ces trésors. Tout à l'enchantement des flûtes d'argent de Stéphane Mallarmé, d'abord, il semble qu'ensuite il retrouva Racine, à travers Hérodiade, pour en arriver enfin à Malherbe.

Rien n'est plus émouvant peut-être, dans la poésie contempo- raine, que ce long silence rompu par la Jeune Parque, et le spec- tacle de ce capitaine savant qu'est le poète des Odes menant rudement les mots à l'assaut de la pensée, après avoir conduit leurs jeux étincelants dans les paysages impressionnistes.

Rare exemple de courage intellectuel ! M. Paul Valéry, du jour qu'il eut senti que l'art de Mallarmé aboutissait aux vers de circonstance, aux improvisations d'album, à des adresses postales laborieusement rimées, comprit qu'il fallait regonfler les raisins du Faune non d'illusoire éclat, mais de suc. C'est à quoi il s'ap- pliqua avec la fortune que l'on sait.

Mais on relira toujours avec plaisir les strophes lumineuses à'FAé :

Et toi, ma'non hn'dante, Espace, cher Espace Tranquille, où F arbre fume et perd quelques oiseaux,

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