NOTES 485
PETITS AIRS, poèmes de Francis Carco, ornés d'un bois gravé par DesUgncres et d'un dessin de Maurice Bar- raiid. (Ronald Davis et C'*-).
La poésie de M. Francis Carco est née entre deux pavés d'une rue déserte, au petit jour, dans le vent crispé et la pluie sédative des lendemains d'orgie. Elle a l'acre et touchante odeur de la belle gueuse de Tristan l'Hermite, et de la mendiante rousse de Baudelaire. Entre les strophes au dessin net et découpées comme les toits sur le pâle azur des cités matinales, on entrevoit des paysages de barrière, d'hôtels meublés, la lueur d'un bar qui éclabousse le trottoir mouillé, le visage d'une vie ardente et secrète, aux traits tirés précocement, aux yeux cernés. Il y a là un pittoresque à la Toulouse-Lautrec qui date un peu, et qui tournerait à la manière si M. Carco n'avait le souci d'être bref,
��aigu
��Maigre et brune avec de gros seins dont les deux pointes sont rongées tu t'étires sur les coussins comme les bètes enragées. Ta croupe étroite a des sursauts, sous tes paupières alourdies tes yeux chavirés sont si beaux qu'ils passent tout en perfidies.
Ces deux derniers vers, admirables et d'une si noble résonance justifient le titre de la pièce : Eau-forte. On voudrait que M. Carco ne burinât jamais que d'une pointe aussi sûre. Ce qui rend parfois si touchantes ses chansons aigres-douces c'est qu'on y sent passer le fier regret d'un poète que n'ont pu satis- faire ses succès de romancier (...à prononcer cette parole
à peu que le cœur ne me fend...)
Non, ce n'est pas à l'appel de Bubu de Montparnasse, mais à la voix de Villon lui-même que M. Francis Carco est venu de Marseille à Paris pour respirer
l'heure anière des poètes qui se sentent tristement portés sur l'aile inquiète du désordre et du tourment.
ROGER ALL.\RD
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