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NOTES 211

élémentaire dans le noble sens de ce mot — quelque chose comme le vent ou le courant du ruisseau, phénomènes impé- nétrables et familiers, étrangers autant que proches et d'où nous viennent nos plus sûrs bonheurs.

Il y a dans ce livre une partie pédagogique dont l'intérêt nous échappe. Madame Cousturier a tenté d'instruire ses amis aux dents blanches, de leur apprendre à lire, à écrire et surtout à parler un langage autre que l'officiel idiome petit- nègre. Apparaît-il nécessaire de faire goûter à ces hommes simples la saveur perfide d'une civilisation à laquelle nous devons notre cécité intellectuelle ? Fort heureusement les Tirailleurs sont en grande part retournés dans leur chaude Afrique. Souhaitons qu'ils aient la fortune d'oublier ce qu'ils ont appris. Puisse le mal de la Connaissance n'avoir pas contaminé à jamais le jugement sûr des Inconnus !

MICHEL DE GRAMONT

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LA RELÈVE DU MATIN, par Henry de Montherlant (Société Littéraire de France).

J'aurais voulu parler de cet ouvrage en écartant la question littéraire. Le fond en est trop riche pour qu'il n'y ait pas injus- tice à s'arrêter aux tâtonnements de la forme. Il faudra pourtant s'y résoudre ; car on doit à un débutant la vérité complète et il serait dommage qu'une telle subtilité et une telle force de pen- sée ne trouvassent pas au plus tôt le mode d'expression choisi, épuré, dont elles sont dignes. Au reste, ce n'est pas par faiblesse que pèche l'expression ici, mais par surabondance et enivrement de soi-même, et déjà, dans quelques morceaux, notablement supérieurs aux premiers : « Devoir d'aînesse et devoir français », (t. Pâques de guerre au collège», et surtout « le Dialogue avec Gérard » qu'on a pu lire dans la revue, elle prend une con- cision, un accent, une juste musicalité qui marquent l'évolution la plus heureuse. Comment un premier livre ne renfermerait-il pas le tout du jeune homme qui l'écrivit, et justement quand celui-ci en a voulu faire une « somme », la « somme » de ses pensées les plus secrètes, dans le moment tragique, unique, où toutes choses sont remises en question par le fait de la guerre et de la mort. — J'ai prononcé le mot de « musicalité ». Abor-

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