198 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
l'Entente aux États danubiens. Si, dit l'Angleterre à l'Irlande:. C'est ensuite le principe des débouches. Les articulations natu- relles d'un pays sont déterminées par ses voies naturelles, par les routes qui lui donnent une circulation normale du cô*té de ses voisins et du côté de la mer. Quelles que soient les causes profondes et diverses de la grande guerre, elle est devenue bien vite pour les Empires centraux et pour la Russie une guerre de débouchés.
Des articulations naturelles, régies par ces trois principes, devraient donc être à la fois ethniques, historiques, géographi- ques. Or, dans la nature de l'Europe centrale, ces trois tendances divergent beaucoup plus qu'elles ne s'accordent. La plupart du temps il faut que l'une soit violée pour que les autres soient observées. Il n'y a pas dans l'Europe centrale un système d'ar- ticulations naturelles, au triple sens que devrait comporter ce mot. Ce qu'il y a de naturel c'est la division. Mais la division a été autrefois aussi naturelle à la France, à l'Italie, à l'Angleterre. En même temps que des forces naturelles de division ont tra- vaillé en Europe centrale les forces conscientes d'unification. Ces dernières, Hohenzollern, Habsbourg, Romanof, sont celles qui se sont effondrées en 191 8. •
L'unification de l'Europe centrale par la victoire des Empires aurait créé un bloc européen prépondérant comme l'est dans le continent américain celui des États-Unis. La politique des vieilles puissances occidentales vis-à-vis de l'Europe centrale est donc nécessairement une politique de division. C'est préci- sément le point de vue traditionnel français sur cette division que M. Bainville a exposé dans ses trois ouvrages et surtout dans les Conséquences. Mais pourquoi ce point de vue est-il resté seulement français ? Tous les alliés n'avaient-ils pas le même intérêt à la division de l'Europe centrale ? Certes. Mais pour chacun des intérêts nationaux cette division suit des lignes par- ticulières. Il ne s'agit nullement de diviser selon les articulations naturelles de l'objet à diviser, mais selon les articulations natu- relles des intérêts diviseurs. Ainsi pour le maître d'hôtel les arti- culations naturelles de son intérêt commercial deviennent par projection celles de la volaille à découper. M. Bainville nous donne l'analyse du S3'stème français. Mais en se résignant à devenir médiocre avocat, il fût devenu peut-être meilleur philo-
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