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NOTES 1 1 9

avec leurs ornements gothiques ; et cette période a été clas- sique dans ce sens, qu'à ce moment toute l'énergie du peuple s€ concentrait vers une fin unique, qui n'était autre que de trouver une expression à l'interprétation spirituelle de la vie. La loi en formait à la fois l'inspiration et l'atmosphère ; et quoique la foi, du moins la foi religieuse, ne forme pas un élément nécessaire de cette intégrité de l'âme qui est le fondement de l'esprit classique, il n'y a pas d'état d'esprit qui d'une façon plus naturelle y conduise, de sorte que cette vision de la vie comme un tout, qui implique que l'individu lui-même soit un tout afin de pouvoir la voir ainsi, ne peut guère être considérée autre- ment que comme un état de foi. Pourtant la foi de la France du Moyen Age avait un caractère spécifiquement religieux, de même qu'elle s'étendait à tout ; et les formes de l'art qui en résultaient avaient en conséquence cette détermination intrin- sèque, sans laquelle l'art n'est jamais pleinement lui-même, n'est jamais classique. Les cathédrales françaises reflètent toute la vie de l'Europe médiévale, et la ferveur de la dévotion qui les avait fait concevoir, et qui leur avait donné forme, avait atteint un tel degré que l'étincelle, que jeta saint François, embrasa son propre pays, et produisit, là aussi, une fermentation dont résulta finalement la « Divina Cominediay>. Les Français n'eurent pas de littérature d'un caractère classique au Moyen Age ; leur langue n'étaii pas prête à servir à cette expression finale de pensée et de foi; mais le feu de l'inspiration, la joie débordante de vie qui rendirent celle-ci possible étaient d'origine française. Avec le temps, la langue française devint un moyen artistique ; le ciel bleu s'est couvert d'un voile gris ; c'est l'époque de la recher- che, dont l'expression type est le « gue scais-je ? », et désor- mais le génie de la nation deviendra analytique. Le besoin de définir, de diviser, de donner des qualifications est impérieux, au point que la poésie elle-même en est imprégnée et subju- guée ; et nous aboutissons à ce phénomène d'un peuple qu'on reconnaît être l'arbitre du goût, et que son raflinement pourtant a privé des moyens d'exprimer la totalité de son humanité, qui même se complaît dans cette perte au point d'enseigner dans ses écoles et de poser en modèle éternel de l'esprit de sa race, dans sa perfection et dans sa pureté, les oeuvres d'une période de formalisme

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