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NOTES 9^1 1

LA CHAIR ET LE SANG, par François Mauriac (Emile-Paul).

Les romans de M. Mauriac sont sérieux, sincères, vivants, et le dernier, plus aéré, plus vigoureux que les deux pré- cédents, me paraît le meilleur qu'il ait encore donné. Touffu, elliptique, il est fait, dans la simplicité de son l]is- toire, de plusieurs sujets qui se coupent un peu. Ceux qui aiment qu'un roman leur laisse une idée nette, et qui attendent de M. Mauriac, apôtre un peu naïf, autrefois, d'une littérature spiritualiste, l'établissement d'une thèse, seront peut-être déçus. Mais ceux qui demandent à un roman la multiplicité et les divergences de la vie ne seront nul- lement rebutés par l'indécision de ce livre ardent et riche : au contraire.

M. Mauriac n'a suivi jusqu'au bout aucune &t5 lignes qui l'ont ici tenté, ou plutôt je m'ex}>rime là à l'inverse de la vérité : il s'est placé à un centre, à un noeud de routes et il a r-ecounu successivement les routes dont ce centre fait' la liaison. De sorte qu'il a l'apparence d'avoir esquissé et supcr- posd plusieurs romans.

L'un d'eux aurait pu être très beau, mais pour le traiter entièrement il faudrait être plus artiste pur, plus indépendant de la vie que ne l'est (heureusement après tout) M. Mauriac. C'est le roman du pouvoir spirituel déchu qui garde pourtant son .caractère et un peu de son action, un uicerdos in xleruuin appliqué à un séminariste qui n'est pas défroqué, puisqu'il n'a pas reçu les ordres, et qu'il a gardé sa foi intacte, mais que la puissance de la chair a arraché du séminaire quand il lui était encore permis de se reprendre. Claude est rentré pour être paysan dans le domaine qu'exploite son père et qui a pour châtelain un bourgeois grossier et brutal dont les deux enfants^ Edward et May, habitués à le mépriser, vivent dans un état d'anarchie intérieure, étant d'ailleurs protestants.

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