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sincérité de Godichon. Toutes les quatre l’ont converti bientôt à la seule religion qui les intéresse, celle du désintéressement. Une communion d’idées, en même temps que le communisme le plus absolu sont réalisés dans cette maison. Godichon dépose tout ce qu’il gagne entre les mains scrupuleusement soignées de Madame Pincengrain. Comme il ne peut plus vivre sans elle, ni loin de Véronique et d’Eliane, quand les indiscrétions de Prisca, insatiable amoureuse, ont lassé Je désir d’un homme que la vie déjà a lassé, — il installe sa belle-famille dans un grand appartement qu’il partagera. Leur salle à manger sera riche, austère et artistique, presque religieuse, gothique.

Godichon a repeuplé d’oiseaux très gais les cages de sa belle-mère, et fleuri les douze fenêtres de l’appartement. Madame Pincengrain se croit revenue dans la forêt de sa jeunesse. Elle se lève de bonne heure l’été, avant que Prisca ne s’éveille, pour parler avec son gendre intimement. Sont-ils seuls et le jour point-il derrière les fleurs ? Godichon lui fait confidence de ses plaisirs. Au détour d’une phrase comme d’un sentier ensoleillé, elle rencontre Pincengrain et salue avec regret ce fiancé ancien et nouveau qu’elle n’avait pas connu. Si Godichon s’égare dans une église et parle sur la religion, elle lui accorde tout ce qu’il veut, — pourvu qu’il ne contrarie pas trop Eliane sur ce chapitre au déjeuner, et qu’il revienne bientôt à l’histoire de ses plaisirs, dont il s’abstiendra de faire mémoire au dîner devant Véronique.