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REFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE 435

le Chasseur de Chevelures, défonuaicur du réel et infor- mateur du possible. Je songeais à ce triple titre en lisant les petits mémoires de MM. Daudet, Dimicr, Tailhade. Le divertissant est même que, les Animaux malades de la peste figurant dans une actualité éternelle, le plus vitupéré des quatre pour sa férocité s'est trouvé M. Albalat qui m'a paru généralement assez plein de sympathie pour toutes les figures qu'il évoquait. A voir l'émotion soulevée par son Moréas, je m'étais attendu à trouver, en ouvrant le livre, sur l'auteur des Stances l'équivalent des pages anciennes de M. Daudet sur le vicomte d'Avenel ou de Laurent Tailhade sur Jean Rameau. M. Albalat nous laisse bien entendre que Moréas n'était pas un puits de science, qu'il ne se targuait pas — et avec raison — de modestie, et qu'il n'était pas venu d'Athènes expressément pour disputer à M. de Coislin le titre d'homme le plus poli de France. Mais il salue en lui un très beau poète, il nous montre derrière ces dehors en somme pittoresques et qui ne faisaient de mal à personne un homme résigné sous une vie d'ennui, ayant des coins tou- chants dé tendresse dans le cœur et qui s'avança vers la mort dans un r}'thme de style antique. N'oublions pas qu'il n'y a rien de plus insipide que les vies de saints laïques et que ce fut une dure destinée pour Descartes et Spinoza que de laissser derrière eux à nous conter leur vie deux hagiographes aussi confits que Baillet et Colerus. M. Paul Arbelet, qui vient de commencer une monumentale et par- faite biographie de Stendhal, ne se croyant pas obligé d'écrire une vie de saint Stendhal, M. Souday s'est étonné et presque scandalisé de voir un homme qui passe pour Stendhalien « débiner le patron ». C'est être précisément un vrai stendhalien que se tenir en garde contre le patron lui-même, et ceux qui, après nous, nous représentent avec les passions, les ridicules et les petitesses qui font leur partie dans presque toute existence humaine, ceux qui lèvent nos

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