Page:NRF 15.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée

292 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

fois pendant une demi-heure de suite, après quoi il prenait congé, assez soudainement, en baisant la main de M"'" Londnirst et en s'inclinant cérémonieusement devant Queenie. Ces visites ne duraient jamais plus d'une heure.

Queenie voulait se persuader qu'elles duraient trop- et même un soir elle dit à sa tante :

— Mais que vient-il faire ici ?

— Quoi, vous ne le savez pas, ma chère ?

Un instant une idée folle traversa l'esprit de Queenie : elle avait trop rabroué et trop humilié M. Harding, et s'il continuait à venir, c'était pour M'"" Longhurst. Déjà une ou deux fois, elle avait remarqué qu'il regardait sa tante avec tendresse, ou tout au moins avec admiration. « Après tout, elle n'en avait pas souci ! Mais la pro- chaine fois, pour qu'ils fussent plus libres, elle se retire- rait dans sa chambre. »

Pourtant elle ne le fit pas. « Tant pis si je les gêne ».- Les histoires de M. Harding et la musique qu'il jouait la distrayaient. Elle s'amusait aussi à l'observer, et elle comprit peu à peu que ce qu'elle avait trouve de singu- lier dans sa personne venait de ce qu'il avait vécu à l'étranger. Evidemment, ces petits haussements d'épaules, ces façons de secouer la tête, ces jeux de physionomie, ces jolis gestes des doigts, et même ce petit peu d'accent — voulu — et qui rappelait à Queenie celui de- Marc Fournier, — tout cela ne venait pas du Somerset. Elle s'en rendit bien compte un soir où elle le vit mimer une scène de querelle et de réconciliation entre un Français du Midi et un Anglais. La vérité, c'était que Marc Four- nier avait pris, à Londres, un peu de ce qu'on appelle-

�� �