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174 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Si je te fiiis entendre ma voix, ton cœur est-il encore à toi pour que tu me le refuses ?

Et ces cheveux que devant ton miroir avec une atten- tion profonde

Tu tressais autour de tes tempes, trouvant qu'il est si joli d'être blonde.

Parce que tu m'as aimé, Royaume, et parce que tu m'as pris.

Parce que ton sang est mon sang et parce que tu es où je suis.

Parce que ton infirmité est la mienne et parce que mon désir est ton désir.

Ce grand lambeau païen dans le vent de la mer jadis, le sais-tu maintenant à quoi il était fait pour servir?

Le jour d'humiliation vient sur toi, de ce compagnon qu'on t'arrache et de cet enfant qu'on tue !

Ah, tes frontières sont largement ouvertes, et l'ennemi t'a trouvé, et ton sein n'est pas si défendu,

O femme, que ton cœur d'amante et que ton cœur <îe mère

Ne rompe avec un parfum qui remplit le ciel et la terre !

Et puisque tu n'as plus de pain ni de vin à offrir, et puisque la guerre a fLUiché ton peuple, et puisque ta vigne est vendangée,

■ Viens dans la désolation avec moi à cette place que j'ai convoitée.

Et baise, te saisissant toi-même à deux mains comme une gerbe de blé vivant.

Cette place où d'un Dieu crucifié il ne reste qu'une mare de sang !

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